« Un larsen + 7 titres de bonheur » ainsi pourrait être la simple définition de ce mini-album qui vient lourdement frapper à la porte de notre pavillon auriculaire.


La formation italienne For Food originaire de Ferrara, sort bruyamment du bois avec Don’t Believe In Time, mini-album, faisant suite au discret EP Snow paru en 2011. Après un larsen de cinq secondes en guise d’introduction, « Love sex and drugs » déboule dans les brancards dans un grand éclat de rire. La basse sonne déjà l’alarme, le sol se dérobe et c’est le trou noir. Sur un lit de percussions invoquant l’ivresse d’Holy Modal Rounders, viennent s’écraser des éclats de shrapnels ardents. En moins de trois minutes concassées, tout y est : post-punk 80’s contrarié, indus chamanique et noise-rock bouchonné s’encanaillent à l’unisson dans un vortex bruitiste hédoniste. Don’t believe in time agrippe la gorge d’entrée.

« City lights » suit, et toujours cette basse lancée en éclaireuse, plus métallique cette fois, en résonance, chant féminin/masculin, phrasé incantatoire et minimalisme froid. Puis le morceau change brusquement de braquet, se réchauffe peu à peu, le cÅ“ur s’extirpe de sa carcasse frigorifiée et la mélodie reprend ses droits dans un magnifique glissement de l’ombre à la lumière. Le reste du mini-LP est à l’avenant. Une histoire de fluides et de vases communicants. Les mélodies semblent se régénérer naturellement d’elles-mêmes, en une juxtaposition parfaitement matérialisée par le bel écrin noir et blanc de la pochette. Don’t Believe in Time est un recueil de morceaux lâchés violemment dans la nature, sans filet ni retenu, d’un jusqu’au-boutisme rafraîchissant.

Qu’elle soit mise à nue dans l’intimité du dialogue guitare/voix de « Twin pigs » où s’échappe la gouaille chaude d’une Shannon Wright. Qu’elle se lance dans une pop à grande enjambée où les Shocking Blue se glissent subrepticement dans les draps élastiques de Grass Widow – « Opium new year ». Qu’un danseur de tango tombe sous le charme brûlant d’une PJ Harvey n’ayant pas encore renoncé aux avances du rock – « La petite mort ». La musique du quatuor italien navigue en eaux troubles, s’éparpille, comme écartelée par ses propres influences, mais les nombreux chemins empruntés restent parsemés de traces de poudre encore fumantes. Un disque en forme de carte de visite, bouillonnant d’idées, éclaté, et à la personnalité déjà bien aiguisée. La première pierre d’un édifice qui s’annonce brillant.