Véritable antenne hertzienne, TV on The Radio semble avoir capté tous les genres pour les ingurgiter avec une fluidité déconcertante. Impressionnant.


Un nouveau fantôme plane au-dessus de Brooklyn. Véritable vivier rock depuis près de trois ans (on évitera quand même de vous ressasser les éternels même noms), l’ex-croissance New-Yorkaise n’a pas encore tout craché et possède de bien beaux restes, peut-être même le meilleur, si l’on se fie aux TV On The Radio.

L’année dernière, leur premier EP, Young Liars (sorti chez Touch and Go) avait affolé toutes les oreilles avides de nouvelles sensations sensorielles, votre humble serviteur était tombé le premier dans le panneau. Cinq titres épatants, qui à l’inverse de ses voisins de palier Yeah Yeah Yeahs et Liars (certains membres figurent sur les crédits du EP), refusait de se laisser empêtrer dans le carcan rock n’ roll en explosant les dernières frontières entre le punk du CB/GB, le groove menaçant de Superfly, et la froideur étouffante de Mezzanine. Des morceaux inventifs, toujours sur la brèche emportés par une voix soul inhabituelle sur ce terrain de jeu. Le groupe se permettait même en guise d’épilogue une fabuleuse version a capella du « Mr Grieves » des Pixies, histoire de bien semer le trouble dans nos esprits. 4AD d’ailleurs s’en souviendra au moment de les signer en avril dernier.

Le Young Liars EP promettait donc beaucoup… Mais comme d’habitude, comme tout buzz en provenance de New-York et ses environs (Rapture, Yeah Yeahs Yeahs…), il aura fallu près d’un an pour enfin mettre la main sur le premier album de nos lascars. L’attente fut dure. On scrutait quelques infos disséminées au compte-gouttes : élargissement du trio en quintet, signature donc chez 4AD, peu de concerts… un véritable mystère planait autour de ce groupe.

Mais pourquoi un tel engouement pour cet énième combo de Brooklyn ? Et bien parce que cette musique est diablement spéciale.
A l’origine de ce trio – reconverti depuis peu en quintette – trois personnalités plutôt aux antipodes :
En tête de ligne, David Andrew Sitek, unique compositeur et architecte sonique. On peut aussi rajouter sur son CV son statut d’ancien roadie des Yeah Yeah Yeahs, devenu leur producteur attitré, ainsi que des Liars. Un parcours atypique pour l’unique blanc de la bande.

Autre pilier, Tunde Adebimpe, parolier et chanteur noir à la voix sombre et chaleureuse. Autre passe-temps en dehors de la musique, dessinateur de Comics Books.

Enfin, Kyp Malone, guitariste minimaliste et affûté qui surfe sur les beats synthétiques, grand amateur de gimmicks dans la veine d’un Joey Santiago. L’homme – que l’on distingue aisément avec une coupe afro démesurée à faire palir de jalousie les Jackson 5 – pousse même parfois quelques vocalises haut perchées dans la pure tradition gospel. Un pur régal.

TV on the Radio est un cocktail atypique procurant une alchimie hors-norme, hybride dirons-nous : un étrange mixture de rock arty, soul industrielle et pop songs à la sauce Bristol. Il se dégage aussi un ton gothique, limite désespéré, qui se fond à merveille avec ses gargarisations soul. A bout du compte, on aurait bien du mal a catégoriser ce groupe, qui tente à chaque nouvelle plage de changer de registre.

On imagine aisément cet étrange combo, reclu dans un hangar désaffecté de Brooklyn, tentant d’expérimenter toutes sortes de rythmes et matières sonores sur leurs compos. Car là où ce groupe fait fort, c’est que ces mousquetaires du son n’ont pas oublié d’insuffler dans le squelette de leurs chansons de véritables mélodies. Tv on the Radio – à l’inverse de ses voisins rock n’roll de palier – met son habillage expérimental au service de solides compositions. En ce sens, ce groupe a de fortes chances de décrocher le jackpot, car la comparaison avec la concurrence semble à chaque fois aboutir au même constat : TV on the Radio fait mieux, que ce soit mélodiquement, en terme également de cohésion, intégrité et ouverture d’esprit.

On ne s’ennuie pas une seule seconde sur ce disque. Il suffit de prêter une oreille distraite sur le bourdonnant « King Eternal », ou bien le single doré « Staring At The Sun » pour comprendre que ce groupe se distingue du panier de crabe. Haut la main.

Ce qui nous revient à penser qu’alors qu’on commençait à se faire un peu de soucis sur la qualité de la production musicale 2004, voilà que nous tombe une bombe à fragmentation sonique.

-Notre chronique du Young Liars EP

-Le site des TV on the Radio

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