L’alliance entre un cinéaste expérimental et un musicien post-rock ne peut qu’aboutir à un résultat d’une grande suggestivité émotive. The Dead Texan sculpte avec force des contours panoramiques amples et fascinants.


Alors que les majors du disque se creusent la tête pour trouver une parade au téléchargement illicite par le biais de copy control dérisoires, d’autres plus futés ont compris qu’il existait une alternative moins despote, comme la valeur ajoutée du support vidéo. A l’heure où le marché du DVD musical explose et sauve les parts de marché de l’industrie musicale, il serait peut-être temps de se poser d’autres questions… Livré en bonus de The Dead Texan, un DVD accompagne le CD : on peut y découvrir sept court-métrages illustrant le contenu audio. Cette démarche purement artistique mérite d’être allouée. D’autant plus que les artistes post-rock n’ont pas été les derniers à s’intéresser à ce nouveau mariage, puisqu’on se souvient de Migala récemment, ainsi qu’auparavant The Mercury Program, qui se sont laissés tenter par ce support vidéo avec brio.

Adam Wiltzie n’évoque pas grand chose pour la majorité d’entre nous, mais ce musicien est bien connu des amateurs de musique post-rock : moitié du duo Stars of The Lid, ou bien en tant qu’ingénieur du son prisé pour les illustres Bedhead, Windsor For The Derby et Cyrus Rego. En termes de collaboration avec un artiste non-musicien, Wiltzie n’en est pas à son premier coup d’essai, il a déjà notamment travaillé avec le peintre Jon McCafferty sur l’album Per Aspera ad Astra.

Son nouveau projet, The Dead Texan, est le fruit d’un jumelage créatif avec la réalisatrice avant-gardiste belge Christina Vantzos. A partir de la même base de travail qu’avait développée U2 et Brian Eno pour The Passengers, c’est à dire des bande-sons de films imaginaires, Wiltzie a enregistré de son côté les séquences audio, tandis que Vantzos a réalisé sept court-métrages abstraits.
On ne sait pas qui des deux a inspiré l’autre, mais le résultat se fond admirablement et demeure toujours d’une beauté hypnotique. Les onze plages audio du disque sont totalement ambient, développant des thèmes mélodiques répétitifs et spacieux. Toutefois, l’usage d’instruments variés permet de dépasser le statut rédibitoire de disque lounge d’un soir. “Glenn’s Goo” rompt un peu la monotonie des ces plages éternelles avec l’intervention d’une guitare solo au phrasé très Floydien et baigné par quelques vocaux lointains. On se laisse envoûter par des accords de guitare folk amples, un feedback cristallin ou une basse dont le motif mélodique reverbéré à outrance retient l’attention. Tout ceci est très conceptuel (on retrouve un hommage à l’obscur acteur français Alain Georges), mais reste à la fois accessible.

Bien souvent, on explore cette sensation de l’inconnu, cette peur du vide, jamais effrayante mais toujours fascinante. L’inaugural “The Six Million Dollar Sandwich” aurait pu par exemple coller à merveille avec le désert mystérieux de Gerry, film expérimental de Gus Van Sant. D’autres passages comme la suite “A Chronicle Of Early Failures”, évoquent le score de Vangelis dans Blade Runner, le gigantisme d’une citée urbaine sur fond de nappes synthétiques désolées .

Que ce soit l’évocation tout à fait subjective d’une ville futuriste ou bien d’un paysage naturel, cette musique développe une notion d’espace qui requiert un sens du silence parcimonieux. Profond.

Le site officiel de The dead Texan