Tels des grands stylistes, Frausdots reconvertit avec chic et érudition la pop new wave d’Echo & The Bunnymen, The Church et The Wake. L’habit n’a jamais aussi bien fait le moine.


Frausdots c’est l’histoire d’un coup de foudre voilà deux ans, lors d’une belle nuit étoilée au festival Benicàssim. Ce soir-là, Brent Rademaker (The Tyde, Beachwood Sparks) et la belle Michelle Loiselle (ancienne vocaliste de Guns and roses (sic)) croisent leur regard pour la première fois durant une prestation incendiaire de The Cure. Oui tout cela commence comme un conte de fée new wave et se termine en… Frausdots !

Voilà dix ans, ce genre d’album aurait été inconcevable, ou serait passé totalement inaperçu. Par exemple, le revival rock de ces derniers temps (qui doit bien faire pouffer de rire Jon Spencer en passant) était plus prévisible, mais durant les années grunge et noisy, la musique New Wave représentait ce qu’il y avait de pire historiquement et musicalement parlant, avec le hard rock de Poison.
Beaucoup n’ont retenu des années 80 que les synthés gluants et boîtes à rythme de poche, rayant de la liste sans ménagement quelques noms trop rapidement affiliés au désastre et qui n’en méritaient pas tant. A l’écoute de Couture, couture, couture, manifeste revival 80’s, on voit très bien où ce duo veut en venir : des chansons clairement estampillées new wave, mais exécutées avec un style et une volonté de réhabilitation qui sonne très juste.

Depuis que The Killers, Franz Ferdinand ou Interpol ont remis au goût du jour cette sophistication rétro, la donne a encore une fois changée. Dans ce créneau qui semble déjà archi-saturé, Frausdots parvient pourtant à tirer son épingle du jeu : lorsque The Killers penchent du côté des Simple Minds et Duran Duran, ou Franz Ferdinand recycle les Talking Heads et Interpol les Chameleons – mettons de côté l’influence de The Cure, mention évidente, mais un peu trop passe-partout ces derniers temps) – Frausdots prône quant à eux des groupes plus lettrés comme Echo & The Bunnymen, The Church, ou The Wake, une musique aux frontières du gothique mais également amoureux de pop songs romantiques et désincarnées.

Tout comme son frère Darren, Brent semble donc faire une grosse fixette sur les eighties. L’éducation musicale chez la famille Rademaker ne devait pas être triste : on imagine Darren vingt ans plus tôt, vibrer dans sa chambre à l’écoute de Felt et des Smiths, tandis que de l’autre côté du mur son petit frère apprend religieusement les mimiques de Ian Mc Culloch sur Ocean Rain et passe en boucle le Heyday de The Church.

On retrouve chez Frausdots des claviers aussi glaciaux que ceux que l’on pouvait entendre chez The Wake, mais tout cela n’est jamais dénué d’humour : “Current Bedding” avec son intro enjouée sonne comme une party chez la famille Adams, lorsque “A Go See” se joue avec une ironie subtile des tics «épouvante» du style.
On pense également et énormément à la bande à Steve Kilbey pour cette même voix nonchalante («Broken Arrow»), et ses emprunts flagrants (le superbe “Fashion Death Trend” qui n’aurait pas dépareiller sur Starfish, voire l’intro très Wilson Piper de « Soft Light »). “The Extremist” quant à lui pompe allègrement l’intro du “Seven Seas” des Bunnymen.

Beaucoup de clin d’oeil donc, mais Frausdots ne se contente pas de repiquer des plans archi-connus, c’est surtout une oeuvre sincère et un disque d’amoureux. Et puis il y a de vraies chansons derrière tout ce carnaval et même plutôt redoutables ! Du limite épique “Dead Wrong” (haaa ces synthés lugubres et spacieux, on n’y croyait plus ! ) jusqu’à “Tomorrow Sky” (avec ses choeurs « tut tut tut tut » très Robert Smith).

Enfin, cerise sur la gâteau, ce disque connaît aussi une liste d’invités assez prestigieuse , des membres de The Cure, The Warlocks, The Tyde (évidemment), Rooney ou le Brian Jonestown Massacre, tous venu apporter leur Casio et boite d’écho vintage.

Délicieusement rétro, mais pas simplement dans l’air du temps, Couture… c’est un peu plus que ça : un billet de retour en première classe pour les grands oubliés des années “Tapis”.

-Le site officiel de Frausdots