Un vent psychédélique vient de souffler sur San Diego, où officie ce combo qui exhume la pop des Seeds et les fraises tagada de John lennon pour notre plus grand plaisir. Attention aux caries.


Alors parce que c’est les fêtes, voici quelques conseils avisés pour jouer dans un groupe dit de psyché-garage, ou plutôt voici les codes indispensables pour adhérer au club :

-Trouver un nom de groupe qui sonne du feu de dieu mais qui ne veut rien dire (la palme revient à The Chocolate Watchband, mais les Silver Sunshine s’en tirent pas mal non).
-La pochette doit être le pur esprit psyché, à la fois mystérieuse et barrée avec des couleurs pétantes.
-Etre accro à la période charnière 66-68 et par conséquent ne jurer que par le vinyle.
-Avoir la « vintage attitude », cela va des fringues au matériel (pédale fuzz, et autres effets phaser, sans oublier la guitare Rickenbacker que vous pouvez chiper à tonton André, ancien guitariste du temps de sa jeunesse des Poppies flashing Snoopy, et qui tient maintenant une brasserie en Seine et Marne).
-Inclure dans ses compos quelques effets de rigueur (cqfd : passer des bandes à l’envers, bruitages incongrus et si possible dénicher un sitar).
-Enfin, se pointer chez le coiffeur avec une photo de Brian Jones.

De ce côté-là, les Silver Sunshine assurent un max. Ils ont l’air cool, et sont surtout censés écouter les bons trucs. En activité depuis Décembre 2001, ce combo originaire de San Diego possède la particularité d’avoir en son sein trois songwriters : Richard Vaughan (guitare, chant), Conor Riley (guitare, chant) et Stuart Sclater (basse, chant), cas de figure idéale pour palier aux périodes sèches d’inspiration. Seul manque à l’appel le batteur Iain Sclater, mais ça on peut le comprendre (vous avez déjà composé vous, une chanson au charlestone ?).

Entre rock à tendance « moulinet » Townshend, popsongs dans le vent et ballades coeur d’artichaut dans le pur esprit Love, ces quatre lascars sont assez complets. Mais si on gratte un peu l’écorce, on se rend compte que l’on a affaire à de fins artisans pop, grands amateurs des mélodies aériennes des Byrds avant leur virage country, fidèles aux délires chimiques de la scène psyché californienne (Seeds en tête), sans omettre de vénêrer l’excellence pop des seigneurs britons (La clique Kinks, Beatles et Barrett en tête). Bref, pas besoin de vous faire un dessin, tout ce qui touche de près ou de loin au psychédélisme 60’s.

Derrière ce lourd bagage, on note également un petit parfum shoegazer sur les compos, guère surprenant avec du recul, puisque ce courant 90’s n’était que le prolongement de l’ère dorée psychédélique.

Alternant tempos fougueux et ambiances feutrées, les Silver Sunshine tiennent bon sur la longueur et parviennent même à pondre quelques sucreries imparables comme “Trinkets”, un hymne power pop par excellence. Les hommages vont bon train : Une intro à la “Daytripper” par-ci, («If I Had the Time»), une dynamique empruntée au “Sunny Afternoon” de Davies par-là (“Way Up in the Big Sky”), tout ceci est pompé allègrement, mais toujours respectueusement et sans se contenter d’un vulgaire copier/coller.

Richard Vaughan, compositeur prédominant du groupe (il signe 7 chansons sur l’album), s’avère le musicien à la sensibilité plus pop et semble avoir potassé le petit songwriter illustré. Mais les autres ne s’en tirent pas mal non plus, à l’instar de Conor Riley, visiblement grand amateur de fraises tagada à la Lennon, qui possède le même grain prolo nasillard que le plus célèbre garçon à lunettes de Liverpool (c’est assez troublant sur “Girl” et “When She Wakes Tomorrow”).

Nos amis savent aussi trousser des mélodies plus subtiles, tel ce “Nightmares”, où quelques jolis arpèges acoustiques et nappes de mellotron rappellent les feux d’artifices de Sgt Pepper. Le disque se clôt dans la grande tradition sur une mini-explosion épique avec guitare phaser et bandes enregistrées, dans l’esprit des Seeds. La boucle est bouclée.

Peut-être pas le disque de l’année (quoique, certains inconditionnels du genre vont se jeter dessus), les Silver Sunshine possèdent un don pour torcher des pop songs finement habillées, finalement plus habiles que leurs sympathiques collègues The Sights ou The Embroocks. De quoi nous filer la banane pendant quelques temps, en attendant le raz de marée de sorties de février.

-Le site officiel du groupe

-Le site du label Wishing Tree