C’est éprouvé, en ayant roulé toute la journée que je suis tombé sur Liz… Un petit bar me faisait de l’oeil, perdu sur une route déserte. Une charmante dame était en train de chanter…


Et je suis directement tombé dedans, dans tous les sens du terme : l’ambiance chaleureuse à souhait, le xylophone et les cuivres accompagnant à merveille la belle.

Le barman dit qu’elle s’appelle Liz James, et que le patron, un véreux pouilleux, l’a engagée à l’essai. Je n’entends plus la suite de ses explications car les guitares se mettent à miauler. Je sirote ma bière et prends mon bien en patience, ça risque de ne pas durer. Une affiche, là, sur le côté, exhibe la pochette de son album : très enfantine, ça plairait à coup sûr à mes filles ce petit dessin avec des fleurs et un oiseau. Liz, elle, continue, très pro, et je pense, bizarrement, à la chanteuse des Pretenders. Je dis bien bizarrement car c’est loin d’être « évident ». Le style, lui, par contre, rappelle PJ Harvey. Toujours la même, oui, je sais, mais il n’y en a pas d’autres, et puis je ne vais pas me gêner sous prétexte qu’on l’a déjà citée ailleurs. C’est comme ça et c’est pas autrement.

Voilà que ça se calme. « Poison & snakes ». Un côté country pastorale envoûte, malgré tout ce que le genre peut évoquer de ringard en Europe, oui, il envoûte. Cool. Je ne pouvais pas mieux tomber. ça me calme ce genre de musique, qui semble plus naturel. Le chant de Liz, surtout dans sa fragilité et son introspection, évoque l’une des soeurs Cocorosie, ça ne pouvait mieux tomber. Je suis sous le charme. Je veux en savoir plus, j’interpelle donc à nouveau le barman. Pas facile, car la gazelle semble adorer les envolées pittoresques et bruyantes. Flamboyantes.

L’alternance semble être son fond de commerce. On va pas s’en plaindre hein! Le barman m’explique qu’elle en est à son deuxième album, et qu’elle a un peu de mal à percer. Elle est soutenue par un petit label indépendant de chez indépendant, le chaton asthmatique (asthmatic kitty records), ceci expliquant peut-être cela. Oui, peut-être, mais elle y a mis tout ce qu’elle avait en elle j’ai l’impression. On sent l’énergie, l’émotion, la sueur, que ces chansons charrient en elles. Elle n’arrive peut-être pas très bien à en vivre matériellement, Liz, mais on peut parier que mentalement elle se porte comme un charme, la création lui permettant d’assouvir tous ces rêves, voire de se résilier.

Le barman – appelons-le Joe – me dit qu’elle est influencée par le jazz, le blues et le gospel, le R & B (elle adore Mavis Staples). Tu m’étonnes! Pas étonnant qu’elle me fasse penser à Cocorosie, surtout sur « Vine », avec en prime un petit ingrédient punk, pour électriser le tout. Ceci s’explique peut-être par le fait que son disque est produit par Rafter Roberts (The Rapture, Tristeza). Son histoire est intéressante : c’est son mari qui décide de sa destinée en envoyant les petites démos qu’elle enregistre toute seule à Sufjan Stevens, futur manager du label des chatons. Une belle brochette d’invités aussi. La trompette sur « Sets to cleaning », c’est Jason Crane (Rocket from the Crypt). La batterie c’est celle de Tom Zinser (Pinback, Three Mile Pilot). Et Raymond Raposa, des Castanets (sur le même label) est venu lui aussi donner un coup de main. Enfin, Pall Jenkins des Black Heart Procession a prêté sa voix ici et là.

Sur « Ocean », la belle se fait muse, et sa voix ensorcelle l’auditoire. C’est d’une beauté éblouissante. Serais-je en train de tomber amoureux. C’est bien possible. Et dire que tout à coup ça s’est arrêté. Toute bonne chanson a une fin me dit Joe…Pas si sûr. J’ai acheté le CD et je l’ai écouté en boucle dans ma bagnole. J’avais encore pas mal de route à faire.

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