Au détour de paysages sonores empruntés par Mojave 3, Mazzy Star ou Spain, la dream pop de Lorna se veut douce et classieuse. Les mots boursouflure et lourdeur sont ici rayés du dico.


Rien de tel qu’une route brumeuse des Highlands pour évoquer les contours mystérieux d’une musique cotonneuse et emplie de mysticisme. Car le second album de ce trio originaire de Nottingham s’abreuve de sensations bucoliques nées de paysages désertés, figés.

Fondé en 1997 par Mark Rolfen, Lorna a publié en 2003 un séduisant premier album, This time, each year sur le label espagnol Pause Music. Entouré de six musiciens, sa musique douce et contemplative se référait aux arcanes détenus par Mojave 3, Spain, Mazzy Star et puis plus récemment The Zephyrs et quelques groupes post-rock à l’humeur en dilettante. Le disque un peu passé sous silence, Sharon Cohen, Mark Rolfe, James Allen et Matt Harrisson sont, il est vrai, peu enclins à hausser le ton pour se faire entendre.

Tout comme son prédécesseur, Static Patterns and Souvenirs voit toujours ses notes de crédits grossir par quelques salutaires compagnons de route : une pedal steel onirique par là, un harmonica, un banjo, voire une trompette enrhumée s’immiscent sans jamais hausser le ton plus haut que le glissement des balais de batterie. Cette dream pop pastorale laisse respirer ses silences, laissant souvent passer quelques secondes entre chaque changement d’accord. Ces moments peuvent paraître durer un instant ou une éternité, c’est selon.

Lors de ces passages précieux, à l’écart des carrefours et autres aires bruyantes d’autoroute, Lorna prend des chemins esseulés, propices à l’introspection. Ces « moments statiques et lointains » immobilisent l’auditeur, le plongent dans une sphère où la notion de temps devient obsolète. Chaque immersion évoque un retour en arrière, des souvenirs introspectifs enfouis dont seul cet état d’esprit carnassier peut nous amener à y retourner. Chaque chanson fait ici son chemin et ne semble répondre à aucun barème, se transformant au fil de sa progression en instrumental artisanal aux accents atmosphériques.

Le roublard “Understanding Heavy Metal Parts I and II”, n’a malgré son titre rien d’une envolée épique portée par des amplis Marshall. La voix du couple Sharon Cohen et Mark Rofle s’apparente beaucoup à Rachel Goswell et Neil Hastead, évoquant irrémédiablement les desseins du magnifique premier album de Mojave 3. Pièce ambitieuse, le voluptueux “The last mosquito fight of summer” (titre magnifique au passant), résume parfaitement cette combinaison si précieuse, dont seuls des anciens groupes esthètes du Shoegazing savent mettre en scène avec une finesse absolue. Les pédales tordues se sont transformés en ondes de theremyn, captant un signal proche du chant hypnotique des sirènes. La formule est simple (quelques arpèges cristallins, une voix susurrée, quelques poufs étalés dans la pièces…) mais demande quelques secrets de manipulations délicats qui peuvent peser lourdement sur le résultat.

En attendant le prochain chef d’oeuvre de la bande à Neil Halstead à paraître d’ici juin, ce petit trésor est une alternative de premier choix et comblera sans encombres vos envies d’égarements bucoliques et divers spleen évasifs.

-Le site officiel de Lorna

-Le site du label Words on Music