Nouveau line-up, nouvelle direction, Mud Flow insuffle du sang neuf à ses chansons. A life on standby honore les vertus d’une pop distinguée et fureteuse.


Certains groupes ont besoin de crise identitaire pour remettre à plat leur musique et définir une nouvelle direction souvent salutaire. Il y a trois ans, Vincent Liben en a fait l’expérience lui qui au sein de Mud Flow voyait un avenir incertain plané sur son groupe. Après deux albums à la consommation rapide, un brin courageux, le chanteur prend la décision de changer son line up, seule possibilité pour redonner une dynamique au groupe. Durant quelques mois, un vent de panique souffle au plat pays avant d’apercevoir une accalmie. Revenu de la tempête, Liben recouvre ses sens et se sent prêt pour assouvir enfin avec tenue sa passion pour la pop anglaise.

Lorsqu’on écoute A life on standby, en omettant la biographie du groupe, on croirait entendre des types venant de Sheffield, Manchester, Oxford, Liverpool, Londres plutôt que de Bruxelles. En effet, les chansons de ce troisième opus fréquentent plus la cour des Catchers, Felt, Orange Juice que celle de leurs voisins belges Ghinzu, Sharko, Girls in Hawaï. Quitte à choisir, on préféra prendre l’option « faire rêver les filles » que cultiver un côté arty à l’abri des rubriques people. Mud Flow a donc choisi son camp. Débarrassé de son acné juvénile, élevé au rock qui tâche des albums Amateur et Re*Act, A life on standby déploie de la mélancolie et de la sensualité dans ses chansons. Un nouveau visage s’ouvre à nous avec des traits fins et délicats. Oubliées les éjaculations précoces et l’immédiateté des débuts, aujourd’hui Mud Flow a appris à dompter ses pulsions soudaines et fait dans la retenue et la fragilité. N’ayant plus peur des silences, les compositions s’octroient des pauses éthérées qui s’envolent en volutes. Libres et légers des titres comme « Chemicals », « Unfinished relief » ou « Song 1 » prennent le temps d’exister et de gérer l’émotivité du moment. Ne cherchant plus à assommer ses mélodies de riffs grossiers, le trio joue avec finesse et sobriété. Il capte désormais l’énergie dégagée par les instruments pour la rendre constante sur la longueur de l’album.

Que de chemins parcourus depuis les premiers pas balbutiants de 1998. Mud Flow a trouvé une voix qui devrait logiquement les conduire vers des rives où la confidentialité n’a pas sa place. Petit trentenaire, Vincent Liben devrait savourer sa nouvelle notoriété avec jubilation. Trois ans ponctués de doutes et de conflits personnels ont été nécessaires pour arriver à obtenir une alchimie entre pop sautillante et rock mélancolique. Si la recette a aujourd’hui trouvé son efficacité, elle la doit en partie à une production soignée, signée par Rudy Coclet. Aperçu aux commandes des disques de Arno ou Sharko, l’homme est partisan d’un son direct favorisant les prises live. Le groupe a dû se soustraire au rythme imposé et puiser dans son intérieur pour y trouver un élan inédit. D’un pas assuré, Mud Flow explore des voies sinueuses et n’hésite plus à se défaire du schéma habituel des trois quatre minutes pour une chanson pop. Ainsi, des titres comme « Five against six » ou « New eve » proches des dix minutes flirtent avec l’audace d’aborder des structures suffisamment étirées et organiques pour brouiller les pistes d’une pop conventionnelle. Rien que pour ces prises de risque, on recommandera A life on standby qui a su trouver un terrain d’entente pour servir une pop à la fois élégante et fulgurante.

-Le site de Mud Flow