Oasis n’a jamais semblé aussi proche de son modèle, The Beatles. Les lads de Manchester le prouvent avec un album qui n’égale pas les deux premiers, mais pointe juste derrière.


Un disque d’Oasis s’écoute habituellement sans discontinuer pour bien s’imprégner de ce qu’il recèle. S’il est vrai que depuis What’s the story (Morning glory) les frères Gallagher ont davantage fait parler d’eux au gré des coups de gueule et autres déclarations intempestives que pour la qualité de leur musique, force est de reconnaître que même dans Be here now, Standing on the shoulder of giants et Heathen Chemistry les bons morceaux ne manquaient pas (« Stand by me », « Go let it out », « Who feels love », « Songbird »…). A l’annonce que les frères Gallagher avaient convié les Death in Vegas à produire leur nouvel opus, beaucoup se sont pourléchés les babines en se disant que le changement de style et le saupoudrage d’électro amèneraient une créativité exacerbée (surtout à l’écoute de « Scorpio rising » sur l’album du même nom). Les mêmes gazettes feront état de l’échec de la manoeuvre… les raisons de celui-ci ne sont pas (pour ne pas dire jamais) très claires. Le comportement nonchalant des frères Gallagher laisse cependant deviner que le studio d’enregistrement s’était transformé en un champ de bataille où les noms d’oiseaux fusaient à qui mieux-mieux…

Un changement – de taille – avait fait son apparition dans Heathen Chemistry… Noel Gallagher, le grand frère, avait laissé Liam composer quelques titres (et quels titres! les meilleurs de l’album pratiquement). Afin de démontrer qu’il ne s’agissait pas d’un coup dans l’eau, mais aussi d’instaurer ne serait-ce qu’un semblant de démocratie au sein du groupe, tout un chacun a été invité à y amener sa contribution. Le résultat est remarquable, et c’est probablement ce qui hisse l’album devant les trois précédents. Le guitariste Andy Bell, tout d’abord, signe le premier titre, « Turn up the sun », tout à fait dans la lignée de ce que le groupe sait faire de mieux, sans s’auto-parodier pour autant, avec un jeu de guitare qui se calme et clôt le titre de manière très cinématique. Belle entrée en matière donc. « Keep the dream alive » montre que les Beatles sont une obsession pour tous les membres du groupe… Liam n’a rien à envier à Andy Bell : « Love like a bomb », écrit avec le bassiste Gem Archer, souligne le bel esprit de la complicité, une ballade dans la lignée du fabuleux « Songbird ». « The meaning of soul » démontre que celui surnommé le « le mioche » par son frère sait aussi briller dans d’autres registres créatifs et vocaux. Et puis son chant, reconnaissable parmi cent, est toujours aussi percutant et extraordinaire. « Guess god thinks I’m Abel », dont le final est éloquent, est marqué plus que jamais par le fer des Fab Four. Enfin, Gem Archer ajoute – seul – sa corde à l’arc en ciel (The sun will whine on you again) qui honore le groupe de Liverpool . Pour clore le chapitre des quatre de Liverpool, rappelons que le nouveau batteur d’Oasis, Zak Starkey, n’est autre que le fils du batteur Ringo Starr. Il se dit en plus que Paul Mc Cartney et Noel Gallagher sont potes…

Même s’il laisse à ses comparses plus de liberté, ce dernier reste, toujours et encore, l’homme sur qui repose Oasis. Il sait pondre de grands titres, et ce même quand il est derrière le micro (…) : « Mucky fingers » semble avoir été écrit dans les jupons du Velvet Underground. Il ouvre de nouveaux espaces au groupe. Et « Lyla » est encore un tube à mettre à son actif. Par contre, « The importance of being idle » fait encore une fois partie de ces titres que l’on aurait préféré ne pas trouver là : le chant de Noel Gallagher plombe le titre et ne résiste vraiment pas à la comparaison avec son frère. Heureusement, « Part of the queue » vient relever un peu le niveau, en ajoutant les LA’s à la liste des références. Autre nouveauté : la présence très prononcée du piano en tant qu’instrument de rythme. Enfin, l’ombre des Rolling Stones est toujours en filigrane ici, avec un harmonica par ici et un riff de guitare par là. Mais ce disque n’aurait pas été tout à fait celui d’Oasis si Noel n’avait pas, lui aussi, apporté sa pièce à l’édifice érigé en l’honneur des Beatles : « Let there be love », chanté par les deux frères, fait office de cerise sur le gâteau.

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