Malgré sept années en stand-by, les co-fondateurs Ken Stringfellow et Jon Auer n’ont pas leur pareil pour trousser des ritournelles pop incendiaires. Leur bonne étoile, celle de Big Star, est toujours là.


Malgré le fait que les Posies n’aient pas enregistré un album digne de ce nom depuis 1998 (le très ironique Success), on se doutait bien que Ken Stringfellow et Jon Auer remettraient le couvert un de ces quatre. Toujours en excellents termes, les deux compères ne se sont jamais vraiment perdus de vue au gré de leurs régulières réunions sur scènes ou plus récemment lors de leur collaboration à l’enregistrement du nouveau Big Star, aux côtés de leur idole Alex « What’s That Sound ? » Chilton.

Connus du grand public pour un seul tube en 1993, le succès massif d’“I can Dream All Day” en pleine déferlante Grunge semble les avoir plus desservis qu’autre chose. Empêtrés ensuite dans des soucis contractuels et passages à vide créatifs, ce combo originaire de Seattle s’est vu épinglé malgré lui sensation « grunge », un comble pour ces éminents disciples de la power pop, auteurs du scintillant Dear 23, voilà déjà 15 ans. Il faut dire que leur apparence « cheveux longs, fringues de bucheron » et le caractère plus rock de l’inégal Frosting The Beater prêtaient à confusion. En ces temps là, Hedi Slimane ne relookait pas tout le gratin du rock.

De retour aux affaires par le biais du label Ryko, terre d’asile pour vieilles gloires indés, les Posies (cheveux courts désormais) ont toujours reposé sur la collaboration étroite des deux songwriters Ken Stringfellow et Jon Auer. Tout comme Robert Foster et Grant Mc Lennan au sein des Go-betweens, cette paire de mélodistes redoutables ne brille que lorsque le talent de chacun est mis à contribution d’un effort collectif. Leur carrière parallèle (des deux, Stringfellow s’en tire le mieux en solo), même si agréable, relève davantage de l’exercice de style des 3B (Beach Boys, Beatles, Big Star) et pêche par un manque de caractère.

Tandis que Teenage Fanclub sort ces jours-ci un nouvel album qui sent l’arthrose, leurs illustres confrères Posies offrent un come-back des plus vigoureux. Premier détail sur les notes de pochettes, les chansons sont signées par le groupe, incluant donc les deux petits nouveaux, Matt Harris (basse) et Darius Minwalla (batterie). Ce véritable effort de cohésion se ressent sur Every Kind Of Light. Les expériences externes ont semble-t-il apporté un sens plus affûté du détail, déjà très développé, notamment sur les arrangements de cordes mais aussi, et là c’est nouveau, sur les textures synthétiques. Ce sens du détail est d’autant plus déroutant que ce sixième album ce serait élaboré dans une totale improvisation en studio, les chansons étant composées et pliées le jour même.

La première plage, “It’s great To Be Here Again !”, anecdotique même si partant de bonnes intentions, nous refait le coup de l’introduction en forme de retrouvailles (les Trash Can Sinatras aussi s’y sont collés…). Les ambiances aériennes surprennent tout de même et ont le mérite de dévoiler le groupe sous un angle nouveau. Heureusement, les choses deviennent très rapidement intéressantes avec “Conversations”, un de ces joyaux mélancoliques dont ils ont le secret : début mélodramatique, puis décollage en pirouette avec un refrain fantastique. Tout ce qu’on aime.

La première partie du disque tend vers des morceaux bruts de décoffrage, tandis que la seconde laisse place à des choses plus subtiles. “All in days Work”, renoue avec la fougue binaire de Frosting on a Beaster. Toujours dans le ton binaire, “I Guess You’re Right”, construite sur une progression d’arpèges tendus, est marqué par un rythme soutenu qui permet au nouveau marteleur Darius Minwalla de se distinguer. Autre petit bijou, “Second Time Around”” et son riff symphonique spectaculaire ne sombre pas dans la facilité et surprend par sa mélancolie aérienne. Car ce qui est notable dans la musique des Posies, c’est qu’en dépit d’une production parfois bodybuildée et pas vraiment justifiée, le chant d’Auer, clair comme de l’eau de roche et jamais abusif, possède des vertus attendrissantes un peu à la manière d’un Joe Pernice.

La deuxième partie se veut enfin plus pop. Il y a indéniablement du Prefab Sprout sur “Last Crawl”, où la voix de Stringfellow plus “Charming Man” que jamais. Petite curiosité, ils se fendent même d’un exercice Rn’B bien enraciné sur “Could He Treat You Better” ou tous les codes du genre sont scrupuleusement respectés. Le son identifiable entre mille de la guitare Rickenbacker à « Byrds » vient nous envoûter sur le très léger et psychédélique “Love Comes”. “Anything and Evrything” – dont le titre de l’album est tiré des paroles – est une ballade déprimée dans l’esprit de Dear 23. Du très comestible donc. “That Don’t Fly”, est encore un pastiche pur Macca, intonations vocales à l’appui, référence que l’on retrouve régulièrement sur les derniers titres de l’album. I Found Finally a Jungle I Like, chauffe les amplis à lampes 70’s à grand coups de riffs shuffle et exorcise le fantôme de ces gros guignards de Badfinger. Si à l’exception de ce titre, les dernières plages du disque manque un peu de piment, le menu d’Every Kind Of Light est assez copieux et varié pour ne jamais susciter la moindre lassitude.

Les amateurs de sensations hi-tec ne trouveront rien de bien novateur ici, juste un sens de la mélodie plus développé qu’à l’accoutumée. Car tout ce qui compte ici, c’est l’âme des chansons. Si vous pensez que la production actuelle néglige cet art en voie d’extinction, ne cherchez plus, ce disque est fait pour vous.

-Lire également notre chronique de Ken Stringfellow, Soft Commands

-Le site officiel des Posies

-Le site du groupe chez Ryko