Pour les vingt ans du festival de l’Alternatif avec un grand A, une première remarque. Avec une affiche défiant toute concurrence, force est de constater – du coup – qu’il n’est pas rare de vouloir se diviser en autant de scènes où quelque chose d’intéressant se produit à la même heure… Mais ceci n’empêche pas que Pukkelpop reste et demeure Le festival à ne pas rater de l’été.


– La journée du jeudi commence avec Engineers, quatuor anglais dont l’album plutôt « doux » trouve sur la scène du club une réécriture très noisy, proche de My Bloody Valentine ou Spiritualized. Le chanteur ressemble comme deux gouttes d’eau à Jean-Luc Lahaye (qui ça?).

C’est ensuite au nouveau Joy Division/Bloc Party/Interpol que nous avons affaire au Marquee. Editors se défend bien en concert, mais sans surprises, avec un chanteur qui cherche parfois à se laisser aller mais qui n’y arrive jamais tout à fait. Ceci dit, c’est très facile de faire ce genre de remarques, je sais.

Première superbe surprise de la journée, c’est à The Magic Numbers qu’on la doit. Quatuor anglais sorti de nulle part si ce n’est du dernier Chemical Brothers, leur country joyeuse, à contre-courant de toutes les modes actuelles, distille un naturel qui fait plaisir à voir. Le look des deux barbus et des deux demoiselles (qui tous, à part le batteur, pourraient avoir participé à Super size me…) participe à cette impression, mais n’empêche pas d’avoir un petit pincement au coeur tant leur set est bourré d’émotion, notamment sur « I see you, you see me « .

The Roots, qui semble avoir perdu Rahzel en chemin (la human beatbox du dernier Björk, en tournée l’année dernère avec Mike Patton), n’en perd pas pour autant son intérêt. Une basse tonitruante et une batterie impériale laissent pas mal de monde bouche bée, tout en excitant les nombreux fucking asses avec un funk hip-hop hendrixien abrasif.

The Departure, au Club, rappellera les années 80, si inspirantes en ce début de millénaire. Comme l’indiquait Paul-Ramone ici , leur rock évoque souvent Suede, The Chameleons, parfois U2, avec un petit côté Duran Duran bizarre. Le chanteur, David Jones, parlera plusieurs fois du Japon, où ils connaissent un succès mérité. On sort de ce set plutôt séduit, avec une envie irrésistible de découvrir plus en profondeur ce groupe qui n’a pas écopé des mêmes feux de projecteur que d’autres. Dommage, vraiment dommage.

Franz Ferdinand, devant un public plus qu’acquis, montrera plutôt ses limites : on se contente d’aligner les morceaux, pâles copies de leur premier disque. Le public a beau sautiller sur « Take me out », ou chanter sur « Matinée », on est vraiment pas très convaincu par leur prestation. Les nouveaux titres servis ici en primeur (l’album ne sortira qu’en octobre) semblent quant à eux sortir de faces B et autres inédits du passé. On restera bel et bien dans le même registre, celui de l’arty.

Enfin, un énorme tumbs up pour The Polyphonic Spree. Jugez plutôt : 23 énergumènes, tous habillés d’une toque orange, vont déverser sur le public leur messe d’un nouveau genre. Les choristes donnent envie de danser, les deux batteurs nous en mettent plein la vue (l’un deux ira plusieurs fois s’incruster dans la foule, et montera pour la finale tel un acrobate sur les échafaudages, donnant à tout le monde de grands frissons), et, enfin, le meneur de revue fera preuve d’un charisme utopique. La bonne humeur (la gente féminine – elles sont huit – arbore un sourire du début jusqu’à la fin) pimentera un véritable spectacle, frisant le modus operandi d’un autre genre : le théâtre. On aimerait que tout le monde puisse en faire autant.

– La journée du vendredi fera, à côté du jeudi, triste mine.

Les Bamby Shambles de Pete Doherty sont annulés? Tiens, comme c’est étonnant. Kate Moss y serait-elle pour quelque chose?

The Coral s’emmêle les pédales, VHS or Beta fait dans le guignolesque involontaire, Death from above 1979 fait du bruit (beaucoup de bruit), The Dwarves aussi (on est déçu que la provocation ne soit pas au rendez-vous). The Go! Team et ses deux batteries ferait bien de changer de rappeuse. The futureheads n’apporte rien de neuf au disque (il faut dire qu’avec des titres servis en deux minutes il n’y a pas beaucoup de possibilités…). Little Barrie ne propose rien de transcendant non plus. Enfin et surtout The Pixies se contentent d’une prestation fonctionnaire en forme de best of qui fera plaisir aux nostalgiques, mais qui lasse si on les a déjà vus auparavant…

Les bonnes surprises? The National est un groupe à ne pas rater en format live. Bien que limité à 4 (alors qu’en mai au Botanique ils étaient au moins huit, avec des violons qui soulignaient leur côté Tindersticks), les titres prennent en concert une dimension très chaude. Le chanteur étonne par son implication corps et âme au chant. A ne pas rater car il s’agit d’un des must de cette année.

Jimmy Chamberlin Complex, du nom du batteur de feu – plus pour très longtemps à ce que l’on dit – Smashing Pumpkins, offre une belle démonstration pratique et audiovisuelle du parfait petit batteur, mais rame par ailleurs. La bassiste n’est pas en cause mais le guitariste vient tout gâcher avec un jeu qui se vautre en permanence.

Fisherspooner n’a de leçons de recevoir de personne en ce qui concerne le know how pour enflammer l’audience. Le Maestro a le sens du spectacle, et la formule batterie-guitare-basse (rock donc, alors qu’il s’agit essentiellement d’une formation électro) donne à leurs morceaux un aspect très vitaminé. Ambiance d’enfer donc. Un disque qui tourne en permanence sur les platines depuis.

Pour ce qui est de l’ambiance, les canadiens de Arcade Fire savent également y faire. L’humour, la perfection dans l’exécution instrumentale, les acrobaties du batteur (tout comme The Polyphonic Spree, la surprise en moins), la vivacité du chanteur, le charme de la chanteuse… On ne peut pas ne pas apprécier leur concert. On en veut encore!

Voilà. Vous me direz : et Nightwish? et Good Charlotte? et Marilyn Manson? Pour paraphraser Liam Gallagher parlant de Faith No More : « It’s not my cup of tea ». Désolé. Pas envie d’être méchant.

– Site du Pukkelpop