Contre toute attente, et envers toutes les modes, quatre énergumènes ne ressemblant à rien débarquent avec un album frais et touchant.


A contre-courant de toutes les modes actuelles – qu’elles soient de look ou musicales – deux paires de frères et soeurs sortent un album qui sent bon la fraîcheur, offrant à ceux qui ont connu The mama’s and the papa’s et Beautiful South de doux souvenirs. Originaires de Trinidad et New York , Romeo (chant et guitare) et Michele Stodart (choeurs, basse et synthés) ont grandi aux sons de la country et de la soul. La grand-mère, souffrant d’arthrite, obligera Romeo à jouer en dilettante sur son piano, pendant que sa mère chante de l’opéra à la télévision. Ainsi guidé par l’acuité de l’oreille de l’ailleule, il prendra goût (!…) à la recherche mélodique et à l’écriture de composition. C’est à Hanwell (Angleterre), où ils déménagent après leur adolescence, qu’ils rencontrent Sean (batterie) et Angela Gannon (chant, choeurs, mélodica, percussions), frère et soeur également, et c’est le début d’une grande amitié.

C’est à partir de 2002, avec la très belle chanson « Hymn for her » (reléguée en dernière position), qu’ils officient dans ce que l’on peut appeler de la country soul. Des premières parties pour Travis, The Bees et Ed Harcourt leur ouvriront pas mal de portes. Les Chemical Brothers, collaborant avec eux sur un titre de leur dernière galette feront le reste. Leur pop insouciante et mélancolique, mais toujours joyeuse, convint de plus en plus de monde de leur sincérité et de la facilité avec laquelle ils accouchent de belles mélodies. Il suffit de les voir en concert (comme au Pukkelpop le 18 août), catharsis proche d’un événement religieux, pour tomber sous le charme. Leur look plus que simpliste, que l’on pourrait qualifier d’ordinaire, et leur physique mi années 70 mi country, le tout souligné par un embonpoint ostentatoire et un franc sourire ne peuvent laisser personne de marbre. Leur négligence à cet égard devient leur principal atout en quelque sorte. « Ugly » auraient écrit certains pour les décrire.

Bon gré mal gré, les bien nommés The Magic Numbers parviennent cependant à sonner avant-gardistes, alors que tout rappelle les années 50 et 60. Par les temps qui courent, et dans l’environnement musical actuel (entre glam, eighties et punk), le quatuor débarque tel un cheveu dans la soupe. L’image n’est pas anodine, puisqu’ils sont tous hirsutes et barbus (sauf les dames), et rappellent en cela quelqu’un comme Badly Drawn Boy. Musicalement, on n’en est pas très loin non plus d’ailleurs.

La délicatesse de « Love’s a game », la joie teintée de mélancolie de « Mornings eleven », la pop song dans toute sa splendeur comme « Love me like you », l’enchantement proche des meilleurs moments de Beautiful South (« I see you you see me » ou « Love’s a game »), l’entraînement à force de clap clap de « Forever lost »… Des moments plus rock, exprimés par les envolées solo de la guitare de Romeo (tel « The Mule »), sont égrainés dans le disque et lui apportent tantôt un souffle fabuleux, tantôt une dureté salutaire, offrant une belle répartie au mielleux des choeurs interprétés par les deux soeurs. Très beau disque, qui ne se laisse pas amadouer facilement.

-Le site des The Magic Numbers