Très bien les petits. Mais vous pouvez faire encore mieux, c’est certain. Encore un petit effort et vous entrerez dans le dico du rock.
Starsailor ? On est vraiment obligés ? Bon, c’est vrai, le chanteur a une voix hors du commun, une gueule de parfait petit gendre, et puis un groupe qui porte le nom d’un des albums de Tim Buckley doit bien y puiser quelque chose non?. Papa est probablement rassuré de trouver des affiches du groupe dans la chambre de fiston…
Ce groupe, à qui on peut reconnaître quelques bonnes chansons (surtout dans le premier album), a toujours été une énigme. Un de ces groupes que l’on pourrait qualifier d’utilité publique, comme la poste en somme, et dont les membres se comportent comme de parfaits petits fonctionnaires, sans rugosité, sans faux-semblant, genuine comme disent les américains.
Côté paroles, on a droit à une remise en question en bonne et due forme, et ce dès la première tirade : I don’t see myself when I look in the mirror I see who I should be. Normal, après le succès du premier album, Love is here, (vendu à 1 million de copies), mais aussi du deuxième (Silence is easy), la tournée guichets fermés en première partie de U2, les comparaisons et la catégorisation qui s’ensuit avec la bande Doves-Athlete-Coldplay, le troisième album arrivait à point (ou pas?). Ils le reconnaissent eux-mêmes sur leur site : la pression était là, mais ils étaient conscients de ne plus être, depuis le deuxième album, the talk of the press, passée à toute la nouvelle vague british qui lorgne plus vers le punk que vers les ballades mielleuses. Alors, tout ceci bien pesé bien pensé, on décide de prendre ses clics et ses claques et d’enregistrer le nouvel album aux Etats-Unis, en Californie tant qu’à faire (il fait beau, il y a du soleil et des nénés)… Si en plus on peut conquérir le marché US, pourquoi pas, ça fera plus de sous sous dans la po-poche. En gourou avisé, on prend ce bon vieux producteur Rob Schnapf (Beck, The Vines, Elliott Smith) et l’ingénieur du son Doug Boehm (Vines, Marjorie Fair, Liz Phair) qui feront de vos chansons des petits bouillons Knorr-Kraft (euh, ouais, facile, je sais). Bon, tout est là pour, encore une fois, faire un album qui plaise aux petits comme aux grands, au dirlo de la maison de disque, au programmateur de MTV et au disquaire de Vaison-la-Romaine (qui depuis les inondations n’a que faire de la vague nu-punk…).
Bon allez, reprenons notre courage à deux mains et lisons attentivement la bio. Le groupe aurait choisi l’option la plus risquée mais ô combien appréciée par les amateurs de l’art pour l’art : ils ont fait l’album que personne n’attendait, livrant ce qu’ils avaient dans le coeur. Wouah! On se demande comment on aurait fait sans dis-donc ! Bon, soyons honnêtes, quelques titres, c’est vrai, sont un peu plus péchus qu’à l’accoutumée, mais de là à parler de risques et d’authenticité il y a un pas (que l’on ne franchira pas). Car enfin, ça reste bel et bien du Starsailor (bâillement). C’est un peu plus rêche, moins soigné qu’avant, mais il manque encore un peu de folie que diable! Le groupe a prouvé qu’il avait du talent, il montre un chouïa de grain de folie, mais il n’y a pas de quoi crier au loup ou faire la une d’un mag punk pour autant. On aurait aimé trouver le son U2esque de « Keep us together » ou « Faith hope love » sur tout l’album, avec cette guitare brouillonne mais si mélodique et ce chant à la Bono (la guitare dans « This Time » vous fera tourner et retourner le livret dans tous les sens, persuadés que The Edge est venu tâter la guitare…). On s’intéresse enfin plus au groupe qui a toujours su délivrer des albums trop parfaits (lisez trop ennuyeux) aux pochettes somptueuses, bourrées de promesses (une véritable leçon de marketing).
Dès le titre d’ouverture, le single « In the crossfire », on a cette impression que le son est étouffé, histoire de ne pas effrayer quiconque. C’est dommage. Ceci dit, cet album supère de loin le précédent et permet d’espérer que le prochain soit vraiment bon. Des titres à la « In my Blood » ou « Way back home » font partie des belles démonstrations en termes de ballades. I don’t know what love is, but i think I had it. Que c’est beau.
Allez, une tournée avec Queens of the stone age devrait dévergonder le quatuor, non?
-Le site de Starsailor