Le deuxième album de My Little Cheap dictaphone ratisse large tout en affichant une cohérence épatante. Histoire de vérifier toutes les références qui viennent à l’esprit à l’écoute de leur Small town boy, l’occasion nous est donnée de sonder Redboy, dont MLCD est le bébé. Décontracté, entouré de sa bande (Jerome Compere, qui ne soufflera mot mais qui respire la coolitude et Xavier Guinotte, au sourire carnassier rappelant un certain Vincent Cassel) et de sa copine, le bonhomme, plutôt affable, ne se laissera pas surprendre par une sélection plutôt pointilleuse mais n’ayant aucun secret pour lui. Ou si peu. « 1,2,3 Let’s go ».
Bronski Beat – « Small town boy »
– (Rires) Les communards ! Ah non, c’est Jimmy Somerville !
Pinkushion : Oui, mais pas exactement. C’est Bronski Beat, dont Jimmy Somerville était le chanteur.
– Oui, c’est lui qui chante ! En fait, le titre de notre album n’a aucun rapport avec ce titre (rires). Non, je trouvais que c’était un titre qui convenait bien car c’est à la fois quelqu’un qui habite à l’extérieur, à la campagne – comme moi, qui habite un peu en retrait du centre de Liège – mais aussi assez urbain – car je sors beaucoup, je voyage beaucoup aussi en ville, ce qui n’empêche pas de rester aussi en retrait, au calme, au bord de l’eau. Ce côté retour aux racines est assez marqué dans l’album. On est revenu vers un côté plus folk et plus country, tout en se mélangeant un peu à la pop urbaine.
Hollywood Porn Stars – « Sadie Sandie »
– Tu veux que je parle d’Hollywood ? Ok ! En fait, pour l’instant, avec la promo de My Little Cheap, beaucoup me disent « tu fais un side project » par rapport aux Hollywood. Non, My Little Cheap précède Hollywood. Le trip est totalement différent. My little cheap c’est ce que je voulais vraiment faire, des chansons basées sur l’émotion. Hollywood c’est plutôt le côté rageur et punk que j’ai envie d’exploiter. C’est pour se défouler en somme. Mais les chansons ici, j’avais vraiment envie de les sortir et de mettre Hollywood entre parenthèses. Ça fait déjà trois ans que le premier album est sorti. Ça fait du bien de revenir à quelque chose de plus simple, avec des arrangements plus fins.
My little Cheap Dictaphone – « Hope you’re back »
– C’est « Hope you’re back », un des premiers morceaux qu’on a écrit pour le nouvel album. En fait, l’album a pris un certain temps à être conçu et à sortir – à cause d’Hollywood entre autres justement. C’est un morceau enregistré il y a déjà deux ans, lors de sessions qu’on avait faites alors. S’il n’y avait pas eu Hollywood, l’album serait probablement sorti il y a un an et aurait été très différent. Avec les morceaux nouveaux, ceux qui sont venus sur le tard, j’ai laissé tomber plein de morceaux qui auraient dù y figurer sinon. On avait tellement de morceaux qu’on a même pensé faire un double, avec un album plutôt bien produit, électrique, et un autre sur un quatre pistes à la maison comme à nos débuts. En fin de compte, on s’est dit que c’était pas mal de boulot, et qu’en plus les gens écoutaient des moins en moins d’albums en entier, alors un double ! On a fait un compromis et on sort un album dont on est vraiment fier. Du coup, il y a des morceaux plus rock et d’autres de la session d’il y a deux ans (dont celui-ci donc). J’apprécie ce côté dense sur l’album. Je n’aime pas tous ces groupes dont on a l’impression d’écouter tout le temps le même morceau, avec le même son. J’ai envie d’exploiter différents instruments, différents arrangements : du rock, de la country, de la pop… Ceci dit, il y aura toujours une marque de fabrique, une certaine cohérence qui reste.
dEUS – « Nightshopping »
– Wouah la ligne de basse !
(…)
Pinkushion : Si je vous dis le plus grand groupe belge…
– dEUS ? C’est un nouveau single ? C’est le dernier album ça ? Je l’ai écouté mais ce morceau-là… Je ne l’écoute pas beaucoup ceci dit… Mais il est chouette ce morceau ! Bizarre… Je suis un très grand fan de dEUS à la base, surtout de leur première période. Les deux derniers albums, moins je dois dire. Quoique The Ideal Crash soit très bon. Le dernier album m’a déçu. En live aussi d’ailleurs. On a joué avec eux avec HPS… C’était chouette pour moi qui suis fan et qui écrivait pour des webzines (nameless) et tout ça de se retrouver à jouer avec eux sur la même scène. J’ai rencontré plusieurs fois Tom barman, et l’ai vu une fois comme DJ. C’était l’occasion de sympathiser, de devenir copains, de partager une scène, ça s’est d’ailleurs très bien passé de ce côté-là. On s’est retrouvés à faire la fête dans un bar avec eux après le concert. Sur scène (soupir)… Avant, il y avait un côté magique, un peu à part. Là, quand tu les voyais, il n’y avait plus cette magie, cette féerie d’antan. Par rapport au rock belge, c’est clair que dEUS… Je ne vais pas dire que c’est grâce à eux qu’on est là, mais ça a ouvert plein de portes. La Wallonie s’exporte enfin, après la Flandre. Les étrangers ne font pas la différence, eux. Pour eux c’est belge tout ça. C’est chouette.
Bright Eyes – « At the bottom of everything »
– Bright Eyes ! C’est tiré du premier album ça ! Je suis un peu incollable sur Bright Eyes ! Je suis à fond dedans depuis le début. Ils ne déçoivent vraiment pas sur la longueur. Je les ai rencontrés à l’occasion d’un de leurs premiers concerts en Europe. C’était à Liège, à la Soundstation. Je donnais un coup de main sur scène. J’ai vraiment eu un flash. On a sympathisé avec eux, et on a fait la fête la nuit après le concert. Le soir du concert je suis rentré chez moi avec un pote qui est devenu par la suite bassiste d’Hollywood. On a acheté le disque, on l’a écouté à la maison, et là j’ai vraiment eu un flash. Je me suis dit : « ça fait plusieurs années que je veux faire de la musique et j’ai enfin trouvé la musique que je veux faire ». Une musique basée sur les émotions, avec peu de trucs autour. Pourtant ce soir-là au concert tout le public parlait mais moi ça m’a retourné. Le lendemain j’ai décidé de vraiment faire carrière dans la musique, d’arrêter de chercher un boulot ou faire des études. Oui, c’est à ce moment-là que j’ai décidé de devenir musicien à plein temps. La suite on la connaît. Ça me donne des frissons quand j’écoute ça !
Sparklehorse – « Spirit ditch »
– Sparklehorse. J’aime beaucoup. Au niveau de la production c’est incroyable. T’as l’impression que c’est tout bricolé, tout petit, et pourtant chaque son est étudié. Mon rêve serait de bosser avec lui. Mark Linkous à la production ! Ou David Lowery, qui a produit les deux premiers albums de Sparklehorse. C’est incroyable ! C’est la grande classe. J’attends avec impatience le prochain album.
Sufjan Stevens – « Concerning The UFO Sighting »
– Sufjan Stevens ! On écoute beaucoup de disques dans ces genre-là, l’indie américain. Sufjan Stevens, on m’en parlait énormément. Je l’ai vu une fois, tout seul pratiquement, à l’Ancienne Belgique, c’était très chouette. Il m’a donné envie d’aller plus loin dans le banjo. Si on a eu envie d’explorer ce côté country, c’est grâce à lui. Son dernier album est grandiose. Et pourtant il n’est pas facile à digérer ! Au début, c’est pas facile. Et il est long en plus. C’est ce qui m’a fait hésiter à sortir un double. Je l’ai revu récemment avec tout le groupe, complètement différent, c’était beaucoup moins folk cette fois-ci, plutôt axé sur des danses, des chorégraphies, des pom pom girls… Un véritable spectacle ceci dit.
Arcade Fire – « Vampire/Forest »
– Grandaddy ? Le morceau ne me dit rien, mais je connais cette voix.
Pinkushion : C’est canadien.
– Neil Young ? Arcade Fire ? Arcade Fire, c’est la grosse claque ça. Je ne sais plus comment je les ai découvert. Je crois que c’était un copain américain qui m’avait parlé de ce groupe, il m’avait dit que ça allait devenir énorme. Après il s’est retrouvé sur tous les classements : 2004 et 2005 (rires). La Soundstation hésitait à leur sujet, et se disait que ça n’allait intéresser personne : trois mois après c’était devenu énorme ! En concert c’est pas mal mais pas ce à quoi je m’attendais. Ça bouge beaucoup mais je n’ai pas eu de frissons.
Venus – « Underwater »
– C’est Venus ? Au niveau de la production c’est vraiment bon ! Marc est un grand fan de PJ Harvey, et il a bien réussi à retranscrire les mêmes ambiances sur cet album. Il a d’ailleurs travaillé avec Ed. Pour moi c’est le meilleur album de Venus. On sent qu’avant ils faisaient de la pop et tout ça, mais que là Marc a vraiment fait l’album qu’il voulait faire, sans penser aux singles et tout ça. Du coup, bien sûr, il est moins facile d’accès et moins pop. On les a vus en showcase et on les a sentis épanouis. En Belgique, c’est un groupe avec lequel on se sent très proche. On avait déjà un peu tourné ensemble en France, à l’occasion du premier album de MLCD. On se disait avec Marc qu’il y a peu de groupes en Belgique qui font ce qu’on fait, à savoir une musique très acoustique, tout en étant électrique. On a la même approche, les mêmes influences.
José Gonzales – Heartbeats
– Je ne vois pas…
Pinkushion : un scandinave avec un nom hispanique…
(…)
Pinkushion : José Gonzalez
– Ah José Gonzales! Il joue au Bota bientôt avec Venus. On en parlait hier. J’ai téléchargé l’album, que je trouve très chouette. Il y a chez nous plusieurs titres qui ont été coécrits avec une suédoise. Elle s’appelle Lillian Vatnoy, elle est en fait un écrivain norvégien. Elle a écrit des bouquins. C’est aussi ma meilleure amie en fait. Quand je l’ai rencontrée il y a quelques années déjà sur internet – c’est une fan de Bright Eyes aussi, on avait des points communs, enfin bref – , elle est venue en Belgique, on s’est rencontrés… Comme elle écrivait de super textes, l’idée trottait déjà dans ma tête. Je voulais qu’elle participe à un album de MLCD. Après le premier album, je voulais que tout soit mieux : un meilleur chant, une meilleure guitare, de meilleurs textes… Car à l’époque du premier album je ne maîtrisais pas très bien l’anglais, et comme Mike Mogis (Bright Eyes) avait produit l’album je me suis dit qu’il fallait que m’y mette à fond. Quand je lui en ai parlé, elle voulait aller encore plus loin que moi dans les textes. On a donc coécrit quatre morceaux dans l’album et elle m’a fait découvrir des tas de groupes scandinaves, comme St Thomas, Christian Kjellvander (dont on a fait la première partie de notre première date à Liège lors du premier album). Magnet est aussi un groupe norvégien que j’adore.
Will Oldham & Tortoise – (Some say) I got devil
– Oldham ! C’était le premier concert important qu’on ait fait. J’avais vu à l’époque qu’il venait en concert au Bota – j’étais très fan – et on a réussi à faire la première partie. Ça nous a mis la pression car on n’avait aucune notion technique! Avec Jérôme (Compère, batterie) – c’est à ce moment-là qu’on l’a recruté – , et à trois, on a fait un concert de quarante minutes. On avait répétés trois-quatre fois, on n’était pas très au point… mais enfin, on avait l’air de toucher les gens. Je crois que notre côté songwriter, qui n’existait pas spécialement en Belgique, reflétait un peu tout ce que j’écoutais : la scène indé belge. J’étais à fond là-dedans. J’avais envie de faire découvrir cette scène à plein de gens. J’avais envie de faire un album, de le produire, qu’il passe à la radio. C’est un véritable défi que faire du songwriting qui se prête à passer à la radio en journée, sans que ce ne soit trop commercial… On pense que c’est inconciliable, mais des groupes comme Arcade Fire qui vendent des millions de disques prouvent le contraire. Pour revenir à Oldham, j’ai un peu décroché depuis deux trois albums. J’ai écouté cet album, je l’ai vu l’année dernière au Pukkelpop, ça m’a un peu déçu. Je me rappelle de la rencontre avec le gars lui-même par contre… J’étais tout gêné, je voulais lui filer mon CD, et il était vraiment super sympa, très abordable. C’était une chouette rencontre.
Arctic Monkeys – « Riot Van »
– Je connais la voix ! Arctic monkeys ? C’est un groupe anglais qui fait de la pop mais ils ont un truc à eux, à part. C’est chouette que la hype actuelle soit constituée de groupes comme celui-ci. Avant c’était des trucs chiants. Mais les Arctic Monkeys ou les Clap your hands say yeah!, c’est intéressant. Je ne les ai pas vus en live, mais on m’a dit que c’était incroyable. Ils sont très jeunes en fait, très simples aussi. Ils sont loin des plans marketing !
Black Rebel Motorcycle club – « Weight of the world »
– Black Rebel Motorcycle Club ! Quel album, quelle production ! Voilà un groupe à guitares qui décide de sortir un album acoustique. La transition est plus que réussie. C’est roots, il y a vraiment une âme, on le sent dans l’enregistrement. Ils ont joué à Mons, et ont filé leur harmonica à la fin à un de nos amis. Je voulais l’utiliser sur l’album, finalement je n’ai pas trouvé d’endroit où mettre un harmonica (rires). Au début, pour cet album, je voulais plein de trucs différents, avec des invités, comme les Girls in Hawaii par exemple. Puis je me suis dit que faire des invités pour faire genre n’avait pas beaucoup d’intérêt en fin de compte. Je sais comment je veux que soit la voix, ou la guitare, alors autant le faire moi-même ! On a eu des invités, mais ce sont des gens dont on avait vraiment besoin : on a bien eu 15 personnes qui sont venus participer, comme Anthony Sinatra qui a beaucoup joué de guitares sur l’album, ou Isabelle Winkin de Mièle qui joue le violoncelle, JF de JauneOrange etc… : les gens qui sont là ne sont pas là par hasard ou pour faire de la figuration.
Soldout vs Girls in Hawaii – I don’t want to have sex with you
– C’est pas Soldout avec les Girls ? Que dire de la scène belge ? On vient de faire une interview pour les Inrocks, qui fait un dossier sur la scène belge. La scène belge c’est quoi ? C’est surtout un état d’esprit, où il n’y a pas de compétition, mais en Wallonie il n’y a pas de cohérence véritable comme pour la scène flamande, où c’est plus un style de musique qui émerge dans une ville, comme Anvers par exemple. Ici, tu compares GIH et HPS et force est de constater que ça n’a pas grand chose à voir. Et pourtant on a tourné ensemble au début. Faut savoir pour la petite anecdote que GIH c’est un peu grâce à nous qu’ils ont eu une signature sur un label. Anthony les a vus lors de l’une de leurs premières fois à Liège, moi j’ai vu leur troisième concert je pense. Le lendemain, j’ai appelé 62 TV et leur ai dit que je venais de voir un groupe qui correspondait vraiment à leur style de musique. Ils venaient de recevoir leur démo justement et tout est parti. Ils nous ont renvoyé ensuite l’ascenseur en donnant notre démo d’HPS à Naïve en France.
Coldplay – Fix You
– Coldplay ? (ahuri) Je n’aime plus trop ce qu’ils font. Pour le premier album, je les ai vus au Pukkelpop avant que ça ne devienne connu, il n’y avait pas beaucoup de gens , j’avais trouvé ça sympa. C’est un super groupe pop qui fait des morceaux très simples, de ce côté-là ça se rapproche de MLSD : simple, pas compliqué. Mais le dernier album je trouve que c’est de la soupe… Sur la longueur, je ne sais pas… j’accroche plus. C’est devenu trop extrême.
Kings of Convenience (remix by Royksöpp) – « I don’t know what I can save you from »
– Je connais ça ! J’attends la voix. (rires) J’aime vraiment beaucoup.
Pinkushion : Kings of Convenience, mixés par Royksöpp.
– Ah oui ! J’aime beaucoup, je confirme. Les DJ sets d’Orlond Oye sont complètement décalés, très bons. Il est très cool. Le dernier album des Kings est sensationnel, très Simon & Garfunkel. Avec Xavier, on vient de voir un groupe à Liège… Ils ont 18 ans, ils s’appellent Dan San et font ce genre de musique-là. On a envie de les produire et de les enregistrer prochainement. On commence à connaître tout le monde à Liège, on croit en avoir faite le tour, et puis débarquent ces jeunes sortis de nulle part. Ils sont très jeunes, ils ont commencé déjà à 11ans.
Modest mouse – « Bukowski »
– Sharko ? (rires) Modest mouse. On devait aller les voir en concert. Sur la route, le moteur de la voiture a explosé donc on ne les a jamais vus (rires). C’est un groupe que j’aime bien mais pas plus que ça non plus. J’aime bien ce genre de voix charismatiques.
Le site de My Little Cheap Dictaphone