Revisiter librement la chanson française au piano pouvait, à tout le moins sur le papier, relever d’un concept marketing d’où le jazz, volontiers édulcoré, n’aurait pas forcément sorti son épingle du jeu. Mais céder à pareil scepticisme n’a pas lieu d’être lorsque le pianiste en question s’appelle Giovanni Mirabassi. Celui qui a été le collaborateur ou le compagnon de route de – entre autres – Agnès Bihl, Jeanne Cherhal, Bénabar, Nicolas Reggiani ou Charles Aznavour, est en effet un fin connaisseur de la chanson, un admirateur de Brel et Ferré, qui a composé plus de quatre vingt musiques pour divers interprètes. Si ces antécédents confèrent au projet une certaine légitimité, reste que Mirabassi ne se contente pas de remplir le cahier des charges, loin s’en faut. Cantopiano, le quatrième volume de la collection « standard Visit » lancée par le label Minium, est un disque solaire sur lequel le pianiste joue avec sa solitude et ses souvenirs, extrait de la profondeur de sa mémoire (qui est aussi, en quelque sorte, une mémoire collective) des airs éternels qui l’habitent depuis toujours. Au plus près de ces mélodies (signées Brel, Gainsbourg, Lama, Brassens, Barbara, Auriat, Nougaro, etc.), Mirabassi cherche moins à nous les faire redécouvrir, comme si on ne les avait jamais vraiment entendues, qu’à mettre en exergue son expressivité et une interprétion spontanée. Nulle trace de nostalgie complaisante ici, juste des doigts virtuoses qui vibrent à chaque note, déposent une sensibilité à fleur de touches, parlent à la place des mots, émeuvent à force de dire un corps tout entier voué à faire surgir une musique vivante et généreuse.

– Le site de Giovanni Mirabassi.
– Le site de Minium.