Sur un premier album particulièrement réussi, les quatre garçons de Cold War Kids se réapproprient la musique américaine pur jus, depuis quelque temps cocufiée par leurs jeunes compatriotes, en lui offrant un écrin bordé d’épines. Robbers & Cowards, disque intemporel, n’est pas près de quitter votre platine.


Le danger, avec un buzz comme celui que sont en train de connaître les quatre californiens de Cold War Kids, c’est qu’il faut assurer le service après vente. Et c’est d’autant plus casse-gueule si l’on rajoute soi-même un cran supplémentaire à ce buzz en enflammant la moindre petite scène croisée sur la route. On en a vu un paquet de ces groupes qui assurent des concerts de feu, sur la foi d’un chanteur hyper charismatique et d’un set physique, mais dont le disque ne dépassera jamais le rang de sympathique oeuvre de troisième zone (les exemples pullulent dans les premières parties de concerts). Heureusement, on en a aussi vu réussir haut la main cet exercice : les Dr. Dog, rencontrés il y a déjà un an en ouverture des Clap Your Hands Say Yeah, avaient réussi ce test grandeur nature avec Easy Beat, un disque aussi foutraque que génial.

Les Cold War Kids, avec Robbers & Cowards, font bien plus que confirmer le bien fondé du buzz. Ils offrent une vraie bombe de blues rock aussi déjantée que riche. Depuis quelques temps, à l’exception de chez ce bon vieux Tom Waits et depuis la disparition de Jeffrey Lee Pierce, on avait pris l’habitude d’entendre des pianos bastringue et des guitares directes plutôt du côté des Flamands, que ce soit avec Venus, ou plus récemment, avec Alamo Race Track. Les Américains, quant à eux, semblaient de plus en plus se consacrer à redécouvrir leurs (l)ivres d’histoires, d’ailleurs tous étrangement bloqués aux 80’s ces derniers temps.

Ce qui frappe d’emblée, ici, dès le premier titre, le single « We Used To Vacation », c’est la voix de Nathan Willett, une voix à l’arrache, haut perchée, directe et virevoltante. Que Nathan Willett éructe (« Red Wine Success ») ou qu’il se pose (la divine « Pregnant »), impossible de rester insensible à un tel débordement d’énergie. Il ne s’impose aucune contrainte, il ose tout, et il nous emporte. Mais cela ne servirait à rien si les compositions n’étaient toutes de vraies petites merveilles d’orfèvrerie, bien plus complexes qu’elles n’y paraissent au premier abord.

Ajoutez à ce cocktail déjà alléchant un groupe aussi costaud que libéré, des compositions toutes plus barrées les unes que les autres, et vous aurez une idée, même assez générale, de ce à quoi vous attendre. Nous n’avions pas rencontré de section rythmique aussi dépoitraillée depuis dEUS (encore des Flamands !), avec une mention spéciale pour la batterie qui n’est vraiment pas là pour le décor : elle se met au service de titres fumants, plus destinés à un pub miteux et bondé qu’au Zénith de Pau.

Vous l’aurez compris, ce qui rime le mieux avec « j’te fais la nique » chez Cold War Kids, c’est l’adjectif « organique ». Et de l’organique, il en faut pour oser une telle diversité d’ambiances avec des moyens aussi primaires. Un premier disque généreux, lyrique et décomplexé…

– Le site de Cold War Kids.