Montgomery, formation rennaise aux influences multiples, nous présente son premier album. Un panorama coloré, parfois brouillon, qu’on n’a pas fini d’épuiser.
Petite mise en garde, pour respecter le principe de précaution : l’écoute assidue de ce premier album éponyme, comme nous l’annonce la voix nasillarde d’un professeur fantaisiste égaré sur la piste 4 (“L’Homme Qui Dit”, toutes guitares dehors) pourrait nous conduire à « [n]otre perte». Les vertiges, la désorientation sont les principaux symptômes qui menacent l’auditeur à la première écoute, tant Montgomery opère un brassage, haut en couleurs, de styles divergents : des harmonies vocales façon Beach Boys en passant par le rock bruitiste de Pavement ou la poésie douce-amères de textes écrits en français, à la Thomas Fersen. Montgomery fait donc le grand écart, sans se faire un claquage, principale menace des gymnastes trop ambitieux. Et si ambition il y a, elle est spontanément tempérée par un deuxième degré assumé («ouais, je sais, je suis une superstar» souffle-t-il, les dents serrées, sur “Moi”).
Difficile, en effet, d’apposer une étiquette sur la musique de Montgomery. Leurs compositions prennent tantôt l’apparence d’un easy-listening faussement consensuel aux harmonies mielleuses (“Champagne”), tantôt les abords plus corsés d’un rock où la guitare est plus ou moins présente (“Melody”, “Ma Chair”), tout en favorisant les arrangements planants et aboutis (“Page 87”). De quoi perdre la tête. Ces apprentis sorciers pourraient bien disparaître (“La recette”) devant les icônes multiples qu’ils ne cessent de convoquer sur ce kaléidoscope musical pour le moins destabilisant.
Et pourtant, la magie de leurs recettes secrètes opère le plus souvent, comme sur “Les Astronautes”, mené par la voix éraillée du chanteur, sublimée par des choeurs et un xylophone, ou sur “Ornicar”, fiction en noir qui répond à cette question surréaliste qui nous obsède depuis le CM1 : Mais où est donc Ornicar ? Apparemment, il a mal tourné ! Les textes recherchés de Montgomery rajoutent un piment supplémentaire à leur musique déjà foisonnante de trouvailles mélodiques et instrumentales. Et quand Benjamin annonce qu’il est « nostalgique du temps des mutants » (“Jeremy”), on comprend, à demi-mots, de quelle nostalgie il relève : celle du mélange sans complexe, de la richesse des possibles, du décloisonnement assumé.
Quelques égarements mis à part, sans doute la conséquence des inspirations tentaculaires qu’il ne parvient pas toujours à synthétiser, Montgomery possède suffisamment de fantaisie pour nous captiver le temps d’un voyage à travers le temps et l’espace.
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