Jean-Charles Versari, chanteur de feu les Hurleurs, s’acoquine à Cyril Bilbeaud (ex-Sloy) et Jason Glasser (Fruit Key, ex-Clem Snide) pour composer le trio Versari. C’est sur son propre label, T-Rec, monté avec Bilbeaud, qu’il propose Jour Après Jour. Sous la houlette de l’immense Ian Caple (Tindersticks et bien sûr Stuart A. Staples), Versari se fond dans des ambiances crépusculaires et automnales pour exposer des histoires de ruptures, d’usure et d’oubli amoureux. Enrobées de guitares flamboyantes, de theremin et de Rhodes, les chansons languissent ou s’affolent, s’apaisent ou exultent, mais ne fléchissent jamais. Du moins en ce qui concerne leur composition, car les textes frisent parfois la banalité. Ce bémol étant donné, notons l’impact essentiel sur ces ambiances en noir et blanc de la voix sépulcrale de Jean-Charles Versari dont le chant atteint une qualité rarement entendue dans nos contrées. L’apport de Ian Caple, familier de la plus belle voix enfumée du monde encore en vie (Staples donc), est ici prépondérant. L’influence des Tindersticks est à ce titre particulièrement prégnante dans Jour Après Jour (ce qui était déjà le cas chez les Hurleurs), mais ce serait oublier un autre modèle, le Bashung de Fantaisie Militaire (même si la réussite qu’est « Lignes Blanches » rend plutôt hommage à Roulette Russe, premier véritable album de l’Alsacien d’adoption). Toutefois, Versari s’autorise parfois des petites escapades hors des sentiers battus, soit pour batifoler dans une pop légère et aguicheuse (« Les Silhouettes », sucrerie raffinée), soit pour expulser une rage trop longtemps contenue sur le reste du disque (« Blunt », brulôt frondeur). Notons en clôture une reprise brillante de « Atmosphere » des Joy Division, où le froid de la lame cède sa place au grand froid polaire. Classieux à défaut d’être ambitieux.