Un jeune suédois fait son trou(s) en creusant une folk aux mélodies faussement contemplatives. Jolie découverte.


Lors d’une récente vadrouille dans l’antre de la très branchée boutique Colette rue St Honoré, l’album de Melpo Mene cohabitait sur l’étalage avec d’autres disques aliens. Etonnante pioche, car ici point de beats empilés/pilonnés façon Justice, juste des cordes de guitare nylon pincées et des refrains qui se sifflotent dans le vent. On peut même dire que la boutique parisienne toujours à l’affût des dernières nouveautés a sur ce coup-là un train de retard puisque Holes remonte à 2004. La faute à “Hello Benjamin” qui tourne dans la playlist de Nova, single électro-pop en trompe-l’oeil cloué d’une boîte à rythmes rachitique à la Colossal Youth. Un titre qui se démarque néanmoins du reste du disque, ou plutôt de ce sachet de madeleines au goût boisé.

Au cas où vous ne lisez pas les nouvelles du Jardinier illustré, il est désormais établi que Stockholm, la capitale nordique, est devenue un terreau propice aux folkers sédentaires. De la plante latino José Gonzalez (signé aussi chez Imperial Recordings) en passant par le saule pleureur Loney, Dear ou encore le cactus sauvage Nicolai Dunger, la variété et la qualité du jardin semble impérissable. A l’instar d’Emil Svanängen, le casanier caché sous l’identité de Loney, Dear, Melpo Mene dissimule un seul homme, Erick Mattiasson. Et tout comme l’auteur du remarquable Sologne, Melpo Mene injecte une bonne salve de mélodies pop à ses guitares qui crépitent en rythme au coin du feu. Ses harmonies légères et flagrantes ont une évidence qui parait tout droit sortie de la grande famille Sub Pop, où l’on ne compte plus les cadors du genre : Iron & Wine, Band of Horses, Fruit Bats, Holopaw voire la face folky de The Shins – et désormais Loney, Dear, dernière recrue.

Sur cet album court mais substantiel, les dix titres acoustiques sont arrosés d’arrangements lysergiques : cloche, orgue, celesta et harmonium… Posé dessus, le brin de voix d’Erick Mattiasson est tellement fragile que l’on craint le toussotement à chaque fin de respiration. Le doute s’efface devant des présents tel que “To Be Someone”, qui aurait pu être piqué au premier album de Rogue Wave (tiens, encore un disciple de Sub Pop). Paré de mélodies solides, Melpo Mene s’autorise quelques rayons de fantaisie : un tour sous les cocotiers (“Tropical Island”) ou carrément une embardée manouche en clôture d’“About Me” que ne renierait pas Django Reinhart, solo à l’appui. Enfin, notons la présence embellie d’Anna Ternheim révélée en France durant la dernière édition des Femmes s’en mêlent (et dont le second album vient de sortir en France chez Universal Jazz) qui vient poser quelques choeurs sur deux des meilleurs titres de l’album “Don’t Save Me” et “Holes”.

L’avantage de découvrir ce petit trésor sur le tard, c’est qu’un deuxième album est pratiquement prêt, d’ores et déjà intitulé Bring the Lions Out. On se réjouit d’impatience de l’entendre se jeter dans l’arène à nouveau. Pour l’heure, si dans la mythologie grecque, Melpomène est la muse du chant, de l’harmonie musicale et de la tragédie, Holes se veut une odyssée pop olympienne.

– Le site de Melpo Mene

– Son Myspace