La Belge Valérie Leclercq derrière le patronyme Half Asleep est un personnage atypique. Privilégiant l’épure extrême, elle officie dans une musique cardinale et cathartique. Ses chansons malades sont limitées à leur plus simple expression. Rarement plus d’un instrument à la fois, des harmonies vocales à la solennité vibrante, la chanteuse ne s’encombre d’aucune affèterie pour livrer une musique particulièrement douloureuse. La partie qui lui est consacrée livre quatre titres gigognes, sensibles et squelettiques. Sur l’autre face, SRX s’enfonce à son tour doucement mais péniblement dans les entrailles de la souffrance, de manière encore plus radicale. Et le tout ne fait qu’un seul et même disque terrifiant. Chaque chanson attise un peu plus la plaie béante et brûlante laissée par la précédente. Cet univers claustrophobe n’a pourtant pas pour vocation d’étouffer celui qui s’y confronte. Il s’agit de lire à livre ouvert dans l’âme de celles qui sont derrière ces poupées déchirées. Valérie Leclercq expose à tous vents ses doutes, ses peurs, ses craintes et ses fantasmes, quant SRX livre ses tripes sanglantes – ce que confirme la jaquette du disque regardée de loin puisqu’elle donnerait à voir une vision cubique de deux visages superposés de jeunes filles éplorées. Et peu importe si la matière exposée l’est pour la galerie, un paravent pour camoufler le vrai moi des chanteuses. Car il ressort de l’expérience de cette rencontre qu’on a affaire à des gamines encore plus abîmées que leurs poupées. Comme un signal fort, un appel au secours, ultime mode d’expression d’oisillons tombés du nid il y a fort longtemps, et qui hurlent de rage plus à l’encontre de ceux qui ne les ont pas ramassées que de ceux qui les ont laissées choir. Et celui qui se sent apte à épauler n’a pas à connaître les raisons profondes du malaise. Etre là, faire front au torrent de mots qui sort de la bouche des chanteuses, chaque mot craché les déchirant un peu plus. Autre moyen plus aisé, plus lâche aussi, d’affronter ce disque en tout point bouleversant : commencer par la dernière chanson de SRX et remonter peu à peu la pente avec elles, retourner vers la lumière de la première chanson de Half Asleep. Mais attention, à la condition unique d’accepter de rechuter en retour, ce qui devrait être moins délicat, sachant les aléas attendus. Attention, extrêmement fragile.

– Le MySpace de Half Asleep et celui de SRX
– Le site de Humpty Dumpty