Une équation musicale sans inconnue par ces jeunes fougueux venus tout droit d’Oxford. Et avec eux, une « Foals » sentimentale.


Cela faisait bien longtemps. Bien longtemps qu’un album, en l’occurrence Antidotes, n’était pas parvenu si rapidement à fédérer. Antidotes est une bombe, à retardement pour certains, à fragmentation pour d’autres. Une onde de choc venue d’outre-Manche qui a balayé le pays à la vitesse de l’éclair. Certainement porté par un panorama musical peu rieur en ce début d’année 2008, l’affectif a tourné à plein régime et cela mérite que l’on se demande pourquoi.

Antidotes est le fait de Foals, un quintet provenant d’Oxford, signé chez Transgressive Records en Europe et Sub Pop aux Etats-Unis. Ces charmants garçons sont de véritables cordons bleus : ils nous ont concocté un mille-feuille musical de premier ordre. Et l’ont préparé avec une précision d’orfèvres. Chez Foals, rien ne dépasse. La recette est souvent la même : des rythmes syncopés développés par une base de batterie puissante, qui reçoit le renfort d’un ensemble de cordes électriques souvent aigues, couinantes, brutales et parfois de quelques cuivres cinglants. A l’arrière, une ligne de basse magnifie le tout. A cela, il faut ajouter le chant martial de Yannis Philippakis. Un leader charismatique et exigeant qui s’explique ainsi : « Elles (les guitares) doivent sonner comme des insectes. Comme un nuage d’insectes formant ces étranges harmonies ». Preuve de leur scrupulosité, les Foals sont produits par Dave Andrew Sitek, qui n’est autre que la tête pensante des formidables, mais pas très accessibles, TV on the Radio et producteur de Yeah Yeah Yeahs et Liars. Mécontents du dernier mixage de Sitek, qui donnait de la reverb à hue et a dia, les oxfordiens l’ont renvoyé dans les cordes pour reprendre la main et modifier ce son qu’ils estimaient trop « spatial ».

Les caractéristiques musicales d’Antidotes ont placé les critiques sur la piste d’un revival math rock, dont les lignes répétitives des Foals seraient la nouvelle expression. Des Battles d’outre-Manche en quelque sorte. Il faut dire que les jeunes Anglais citent régulièrement dans leurs influences de l’electro dépouillée (le duo allemand Monolake) et plus précisément le pionnier du minimalisme, le New Yorkais Steve Reich. De plus, les copains d’enfance Yannis et Jack (un autre membre du quintet) ont débuté dans un groupe de math rock au nom aussi engageant qu’une soirée baignade sur la plage de Gravelines un 22 novembre, The Edmund Fitzgerald. Cela posé, en effet, la case math rock pouvait être cochée.

Mais cette lecture n’est pas satisfaisante. Il faut également prendre en compte que les deux garçons ont quitté The Edmund Fitzgerald, formation qu’ils jugeaient trop sérieuse, pour retrouver le plaisir de faire de la musique… avec Foals. Outre Monolake et Steve Reich, sont citées aussi en influences des icônes de la panzer pop, Nelly Furtado et Gwen Stefani. Et l’écoute d’Antidotes nous conforte dans l’idée que leur musique échappe aux équations savantes, aux considérations vectorielles griffonnées sur un papier à carreaux. Leur chevauchée n’est pas aliénée à cela. Antidotes, malgré son apparente rectitude, est également sauvage. S’il contient des morceaux à l’attractivité immédiate (“Cassius”, “Two Steps Twice”), il est également composé de quelques plages qui voilent leur beauté, la découvrant le temps passant : “Tron” ou “Heavy Water”.

Antidotes est plus complexe qu’il n’y paraît : il faut y appliquer une lecture à la fois intellectuelle et sauvage, quasi-tribale. Electro rock, afrobeat (l’influence Antibalas), math rock, post-punk, ska. Antidotes est tout ça. Toutes ces cases cochées, plus celle qui est tout en bas, la case « Autres ». Le tout emporté par les Foals.

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