Neuf ans séparent ce nouvel album du fils aîné du grand Fela de l’impressionnant Shoki Shoki, et la flamme est toujours là, intacte. Femi Kuti, après avoir explosé les ponts de l’histoire en remettant en avant le courant dont son propre père fut le créateur, l’afrobeat, continue de porter fièrement le flambeau sans se lasser, sans oublier tout les éléments qui constituent cette musique enragée. Rythmique puissante, gros son, sens politique viscéral, Day By Day donne à entendre un héritier tout à fait digne de son géniteur. Jour après jour, scène après scène, studio après studio, album après album, Femi se fait un prénom pour devenir à son tour le fer de lance d’une scène passionnante et par trop méconnue à ce jour. De la beauté de l’homme à la beauté de la musique, il n’est plus la simple réincarnation d’un mythe, il devient à son tour un mythe vivant. Adulé au Nigeria, son pays d’origine (même s’il est né à Londres), comme dans le reste du continent africain, Femi creuse le sillon de l’afrobeat en y apportant sa pâte. Si son père lorgnait vers le jazz le plus abrasif, privilégiant l’incendie à la braise, le fils use de codes plus contemporains, plus audibles par le plus grand nombre, versant par exemple dans le reggae, ou se contentant de citer de grands noms du jazz — et même Fela — sur “Do You Know” qui rappellerait plutôt les grandes heures de Stevie Wonder, ou en intégrant la basse et la trompette introductive de “So What” de Miles Davis sur “You Better Ask Yourself”. Toutefois, les cuivres sont toujours aussi énormes — “Demo Crazy” en point d’orgue –, la basse increvable — voire totalement hallucinée sur “One Two” –, les percussions et les guitares farouchement débridées — partout ailleurs. A 45 ans, Femi Kuti n’a rien perdu de sa verve et de sa colère, et à l’instar de Fela, ni le succès international ni la richesse qui va avec ne l’ont détourné de la mission dont il se sent — légitimement — investi à son tour. Soutenu par un groupe hallucinant, exalté par un son chaud et envahissant, Day By Day est, comme les disques des débuts, un album magnifique et monstrueusement efficace. Et porteur d’un message malheureusement plus urgent jour après jour.

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