Derrière Alexander Ebert et Edward Sharpe se cache un seul et même homme. Et devant lui, l’americana. Californie, nous voilà…


Barbe de prophète, tête de bon samaritain, et dégaine de hippie. A vrai dire, Alex Ebert est le genre de gars à qui l’on donnerait le bon dieu sans confession. Et l’homme a déjà des millions de fidèles, envoûtés par les sifflements de « Home », le tube planétaire d’Edward Sharpe & The Magnetic Zeros, extrait de l’album Up From Below (2009). « Let me come Home -Home is wherever I’m with you », c’est donc lui et sa troupe . La musique euphorisante d’une fanfare hippie sous influence sixties a envoyé du « love » à tous et à toutes et a rendu tout mou les cœurs les plus récalcitrants.

Aujourd’hui, Edward Sharpe remis au placard, c’est sous son véritable nom qu’Alexandre Ebert sort un album, son premier en solo, qu’il a entièrement écrit, composé, instrumentalisé en marge des tournées de son groupe. On peut dire que l’ancien frontman du groupe punk Ima Robot s’est donné du mal. Pour quel résultat ? Si « Home » a vampirisé le reste des compos, plutôt probantes d’ailleurs, des Angelinos en 2009, il en sera sûrement de même avec Alexander. Disons le d’emblée, “Truth”, moment de délicatesse de 4’23, ne peut laisser insensible. Des sifflements (encore !) à faire chialer Ennio Morricone, un rythme percussions-guitare délicat, des chœurs vaporeux et une voix soyeuse, légèrement reggae, qui donne le tempo et de la consistance à l’instant. Au sortir du morceau, une évidence : Alex Ebert respire l’ouest américain, du désert du Nevada aux falaises de Big Sur, de Zabriskie Point au festival Burning Man. Il incarne.

Ce moment digéré, le reste de l’album peut paraître en-deça. Mais ce serait refaire l’erreur de « Home ». Ainsi, ne pas passer à côté de l’ouverture. “Let’s Win” est une folk-song bien troussée, qui commence comme du Blitzen Trapper et se poursuit avec les Beatles. Étonnant, mais efficace. Ce néo-Devendra Banhart, époque Cripple Crow, semble balayer la musique US, avec plus au moins de réussite : la black music pour “Bad Bad Love” et “Glimpses” (Ben E. King, où te caches-tu ?), l’antifolk façon Kimya Dawson et Adam Green pour “Let’s Make A Deal”, Cash et Springsteen convoqués pour “Old Friend”… Parfois on frôle la catastrophe comme avec “A Million Years”, dont les chants ont tendance à rappeler le roi Lion. Sans dommage.

Au bout du compte, on sort de cet album avec une certitude : Alexander Ebert aime la musique, a envie de la découvrir, de la défricher, d’expérimenter. Il est encore en chantier. Sans « Truth », c’est le genre d’album dont on dirait qu’il est facile à faire. On peut l’apprécier sans l’idolâtrer, le critiquer sans le descendre en flammes. Il est aussi un formidable aperçu du potentiel d’Ebert. Le barbu a montré qu’il pouvait être bon en tout. Il lui reste à prouver qu’il peut être le meilleur en quelque chose.

– Site officiel
« Truth » :