Le costume de maestro lui sied naturellement. Compositeur, arrangeur, producteur, musicien… Jherek Bischoff est un habile touche-à-tout.


Le costume de maestro lui sied naturellement. Compositeur, arrangeur, producteur, musicien… Jherek Bischoff est un habile touche-à-tout. Ses connaissances approfondies en matière musicale lui ont valu, de la part du New York Times, le qualificatif de « polymath pop ». Outre ses collaborations sur les albums de Xiu Xiu, Casiotone for the Painfully Alone et la diva baroque Amanda Palmer (ex Dresden Dolls), ce trentenaire basé à Seattle, officie au sein du groupe pop experimental Parenthetical Girls. Nous le retrouvons ici à la tête d’un grand projet personnel. Composed est un disque de pop orchestral bénéficiant d’invités tout à fait exceptionnels, avec notamment des voix triées sur le volet : David Byrne, Caetano Veloso, Craig Wedren (Shudder To Think), Carla Bozulich (Evangelista), la folksinger débridée Mirah (du duo Thao & Mirah), ou encore son camarade Zac Pennington (Parenthetical Girls)… pour ne citer que les plus connus. Rajoutons en guise de cerise sur la cake la participation des musiciens de premier plan tels que le guitariste Nels Cline de Wilco et le batteur Greg Saunier de Deerhoof. Voilà pour le casting. On ignore comment le chef d’orchestre a pu réunir un parterre si prestigieux, mais nul doute que la splendeur de ses compositions, nappées de cordes luxuriantes, fut décisive au moment de convaincre ses collaborateurs. Le projet est périlleux, le résultat est enchanteur. Certaines performances donnent le vertige : la valse autrichienne « Eye » chanté par un David Byrne magicien, comme si ce morceau lui collait à la peau. Jamais très loin de l’ex Talking Heads, son ami tropicaliste lui succède pour une fantaisie « electronirique », du plus bel effet (profitons-en pour signaler la parution chez Nonesuch d’un superbe album Live où les deux vieux complices se partagent la scène, mais revenons à nos moutons…). Quant au single tout désigné, « Young and Lovely », où Zac Pennington s’illustre brillamment en duo avec Soko (la petite frenchy qui a le vent en poupe), les arrangements baroque rivalisent avec le léché Casanova de Divine Comedy. Mais tout n’est pas non plus que démesure. Quelques compositions développent des thèmes même étonnamment plus expérimentaux voire tortueux – « Blossom » avec l’intervention déviante du guitariste Nels Cline. Quand on sait que toutes les chansons ont d’abord été composées au Ukulele, puis arrangées pour un orchestre, on se dit que Bischoff est un esprit singulièrement débridé. Quelle sera sa prochaine folie ? Il y a de quoi éveiller notre curiosité.