« We are the sons of no one » , revendiquaient en 1985 The Replacements sur leur hymnesque « Bastards of young”. Vingt-sept ans plus tard, un duo effronté, Japandroïds, prolonge cette ligne de conduite avec leur rock incandescent.


« We are the sons of no one » , revendiquaient en 1985 The Replacements sur « Bastards of young”. Vingt-sept ans plus tard, un duo effronté, Japandroïds, prolonge cette ligne de conduite avec leur rock incandescent. Se gardant bien de révolutionner le genre, le binôme guitare/batterie de Vancouver a cependant le mérite de redonner au rock un certain goût du danger, à l’heure où les guitares distordues sont bannies au profit des claviers analogiques. Brian King (chant/guitare) et David Prowse (batterie/chant) ont des gueules d’outsiders, et ne s’en cachent pas. Ce serait presque leur fonds de commerce, à en juger par l’esthétique systématique de leurs portraits en guise de pochettes. Sur disque c’est tout autre chose, ils jouent plus fort, plus habité que tout le monde. Celebration Rock, leur second opus, contient huit morceaux, exactement le même ratio que sur leur premier opus Post-nothing (2009). Ce que tout album de rock abrasif devrait raisonnablement durer depuis Fun House (les fans en manque pourront néanmoins se procurer leurs faces B, régulièrement aussi mémorables que leurs singles). Leur rock frontal, pris à bras-le-corps, a encore acquis en assurance, avec une dimension certes plus « fédératrice ». La négation exacerbée du premier album Post-nothing (2009) et du EP No Singles (2010) tend désormais vers cette flamme rock qui leur fait office de résistance au quotidien, et source paradoxale de bien d’interrogations (les paroles de « Continuous Thunder »). Ces nord-américains n’ont pas les manières, mais ils savent tout donner, sans exception. Et c’est ce qui nous fascine. Des brulots binaires construits systématiquement sur la même trame : refrains en canon punk et une guitare électrique tronçonneuse à réveiller la tombe d’Hüsker Dü. Il n’empêche, de ce son binaire s’extirpe une intensité dramatique inhabituelle. On y trouve toujours notre compte, tant l’énergie évacuée par ces droïdes transpirant de tous leurs pores est phénoménale (les hymnes instantanés « Fire’s Highway », « The House That Heaven Built », « Younger Us »). Seul une reprise du Gun Club, assez fidèle à sa puissance originelle (ce qui n’est pas peu dire !), tranche avec l’esprit – l’urgence – générale du disque. Ce songwriting de haute-volée nous renvoie en pleine figure la poésie exacerbée d’un Paul Westerberg, cet état de grâce si difficile à canaliser. En termes de prise à haute-tension, difficile de trouver meilleur jus ces temps-ci.

Japandroids – « The House That Heaven Built »