Un bien étrange et singulier ami que revoilà…
Un bien étrange et singulier ami que revoilà… Cinq ans en arrière, nous avions salué, les mains levées au ciel, le premier album de ce sextet de Glasgow et sa surprenante capacité à s’approprier tous les genres qui passaient à leur portée : psyché pop, electro, math rock, indie rock, kraut, prog, folk, BO morriconiennes et l’on en oublie… The Phantom Band faisait preuve sur Checkmate Savage d’une belle audace instrumentale, qui plus est servie avec une fine pointe d’humour écossais. Difficile à catégoriser, le groupe nous tendait une perche en se décrivant comme un « proto-robofolk ». Et il y a peu de ça, c’est vrai, dans leurs constructions instrumentales hors-normes, comme si un Hubot de la série TV suédoise Real Humans s’initiait simultanément à pratiquer différent genres musicaux, dans un délire ludique et communicatif. Un bug heureux en somme ! Pourtant, The Wants, second opus paru deux ans plus tard, freina notre engouement : le douloureux processus d’enregistrement impacta sensiblement sur le moral des troupes, livrant au final des compositions un peu perdues dans leur complexité. The Phantom Band y laissa d’ailleurs en chemin leur batteur. Surprise, Strange Friend rectifie le tir et dépasse même toutes nos espérances. On peut sans crainte affirmer que ce troisième opus est leur meilleur à ce jour. Plus alerte que jamais et regonflé à bloc. Ce qui a changé dans le moteur, c’est l’apport de la nouvelle recrue Iain Stewart derrière les fûts, décidé à insuffler coûte que coûte du groove à leurs détonants collages. On rentre de plein pied avec les trois premiers morceaux qui déploient des trésors d’énergie (mention spécial à « Doom Patrol », et sa rythmique pachydermique digne d’un dieu stoner, décapant !). Par la suite, Strange Friend échafaude des idées plus hypnotiques et tordues : « Atacama », captivante folksong celtico-indienne, cernée de synthés bib bip bizzaroïdes, ou encore « No Shoes Blues », drôlement mélancolique, c’est le moins qu’on puisse dire. L’excellent chanteur à barbe Ricky Anthony (si si cela s’entend ! qui évolue d’ailleurs en solo sous le pseudonyme Rick Redbeard) évoquent parfois les joyeux bricolages du Grandaddy des débuts, même si sa voix se pose dans un registre plus grave. Enfin, nous éprouvons l’agréable sensation d’entendre un solide effort de groupe, où chaque musicien s’épanouie pleinement. Ce qui est finalement assez rare dans le genre. Du très bel ouvrage collectif, en somme.