D’évidence, le label Talitres ne pouvait passer à côté d’un talent si familier…


D’évidence, le label Talitres ne pouvait passer à côté d’un talent si familier. Quand on connait l’histoire du label indépendant Bordelais, qui a si ardemment défendu les rockers new yorkais de The National à leurs débuts sur le vieux continent, on imagine le choc procuré par la découverte de cette voix si marquée répondant au nom de The Callstore. En effet, difficile de ne peut nier la troublante ressemblance avec le timbre grave, lent et profond de Matt Berninger. Outre cette agréable similitude (il y a tout de même largement pire comme comparaison), émerge ici un authentique talent de songwriter. Celui d’un trentenaire Français, Simon Bertrand, londonien d’adoption depuis une quinzaine d’année, et probablement presque autant d’années passées à enregistrer ses chansons en catimini dans sa chambre d’appartement. Il faut considérer Save No One non pas comme un premier album traditionnel, mais plutôt comme une collection éclectique de chansons accumulées au fil du temps. Le journal intime d’un musicien solitaire, reflet naturel de ses diverses mues artistiques et humeurs : que ce soit sur un rock rêche et enlevé (« Lovers Lane », « Rich Man »), une popsong tristounette (« Sad Sometimes »), un folk ténébreux (« The Letting Go ») ou de l’electro-pop cheap (le magique « In Between Tricks The Magician Bows », le moins convaincant « Thou Shall Be Broken »). Malgré parfois les grands écarts de style, il transparaît en creux de cette douzaine de titres un captivant lyrisme clair-obscur. A la première écoute certaines compositions peuvent dérouter par leur âpreté, mais se révèlent dans l’ensemble de vibrants témoignages d’une mélancolie authentique, car sans artifices. Et lorsque émerge d’autres perles élégamment habillées, simplement accompagnées d’une guitare sèche et d’arrangements discrets, on ne peut qu’acquiescer d’une écriture supérieure flagrante, littéralement habitées par la grâce – « The Letting Go », « The Departed », « Come on Then »… « Above And Beneath Your Feet » mériterait d’être réenregistré avec un orchestre tant il s’y trame une bucolie ambitieuse à la hauteur d’un Tom Waits. Aux dires de sa biographie, Simon Bertrand préfère pour le moment profiter de sa vie quotidienne londonienne, loin des contraintes du musicien itinérant. On se prend pourtant à rêver dans un avenir proche d’un vrai premier album studio. D’ici là, Save No One pourrait bien sauver quelques âmes cet automne.