Troisième opus pour le trio bordelais emmené par Julien Pras, qui l’assied définitivement en superbe OVNI du genre stoner psychédélique.


MARS RED SKY – Mindreader – 2016 – Official from MARS RED SKY on Vimeo.


Etonnante trajectoire que celle empruntée par Julien Pras, le leader de Mars Red Sky qui nous avait habitué dans un passé pas si lointain à des mélodies folk soyeuses et étoffées en solitaire ou au sein de Calc et Pull. Mais tout considéré, le grand Elliott Smith lui-même, ne s’était-il pas aussi distingué jadis au sein d’Heatmiser, dans une veine hardcore Fugazienne ? Le musicien bordelais a donc choisi le chemin inverse (mettant en parenthèse sa carrière solo), passant de la pop/folk précieuse aux riffs stoner /doom de profundis au sein du power trio Mars Red Sky, fort de deux albums dont la réputation à largement dépassé nos frontières. Eloges amplement mérités, à l’écoute de ce troisième opus, Apex III (Praise For The Burning Soul), qui se hisse à la hauteur, si ce n’est dépasse, les plus grosses productions internationales du genre.

Enregistré en studio sous la houlette du producteur Gabriel Zander, Apex III (Praise For The Burning Soul), qui succède donc à Stranded In Arcadia (2014), résonne d’évidence comme l’album le plus abouti des stoners marsiens, tant sur le plan de la production – tout bonnement dantesque -, que des compositions, d’une épaisseur voire d’une richesse stupéfiante. Avec ses acolytes – la paire rythmique Jimmy Kinast à la basse et la dernière recrue Mat Gaz à la batterie -, le guitariste/vocaliste Julien Pras aiguise les angles de son triangle singulier. On apprécie particulièrement chez Mars Red Sky cette capacité à pousser l’expérimentation au-delà du totem sacré des quatre premiers albums de Black Sabbath, dont bien des groupes du genre ont du mal à se départir.

For de l’expérience acquise en tournée, le trio a appris à repousser les limites de sa formule, qu’il porte désormais magistralement du bout de leurs ongles vernis de noir. Notamment grâce à Julien Pras, mélodiste de haute volée, ainsi que son chant haut et claire, inhabituel dans un genre où la virilité et la pilosité sont de mise. Mars Red Sky possède une propension particulière lorsqu’il s’agit de développer des progressions d’accords sinueuses, avec un sens absolu des contrastes (chant aérien/rythmique ultra pesante). Une écriture qui ravira, loin du consortium rock binaire, les admirateurs de la pop de Calc.

Les lignes infra basses de Jimmy Kinast, pilier du son du trio, serpentent délicieusement comme sur le riff frontal, et le groove mammouth de « The Whinery », ou encore le psyché « Friendly Fire », aux harmonies en lévitation avec sa construction imparable (du Built to Spill version trois tonnes !). On pense parfois aussi à Alice in Chains sans les lamentations vocales embarrassantes (“Mindreader’), ou à de la folk acidulée fondue dans un chaudron doom (le venimeux prodigal Sun). Enfin, quelle judicieuse idée que de rajouter en bonus, Shot in Providence, tiré du EP Providence paru en début d’année : Huit minutes de magma fuzz ininterrompu, une éloge de la lourdeur dans tout ce qu’elle peut avoir de plus audacieux. Indéboulonnable sur son orbite, Mars Red Sky plante désormais son drapeau, loin, très loin devant devant la concurrence.