Jim McCulloch fait partie de ces musiciens britanniques dont le talent d’écriture et la finesse du jeu enchantent nos oreilles pop depuis le début des années 90, que ce soit au sein des BMX Bandits, des The Soup Dragons ou en collaborant avec Isobel Campbell et Mark Lanegan, entre autres. Nous avons pu l’interviewer à l’occasion de la sortie de son premier disque solo  When I Mean What I Said.


Pinkushion : Après plus de 30 ans d’une carrière musicale dense parsemée de collaborations riches et diverses, qu’est-ce qui t’a fait penser qu’il était temps d’écrire et de publier ton premier album solo?

Jim McCulloch : Il y a 4 ans, je me suis dit qu’il serait bon de retourner sur les bancs de l’université car j’avais un sentiment d’inachevé. J’avais abandonné mes études afin de rejoindre The Soup Dragons à l’époque. Je suis retourné à l’université pour étudier la musique et j’ai obtenu une maîtrise en composition – oui, un tel diplôme existe ! Cet ensemble de chansons est le point culminant de mes études. Ça a été un long voyage mais j’y suis arrivé.

Ton disque trouve ses racines dans la musique pop et folk, une grande tradition dans le paysage musical britannique. Par qui as-tu été influencé?

Je suis avant tout un guitariste acoustique, j’ai donc toujours été attiré par la musique enracinée dans le folk, que ce soit « Blackbird » des Beatles, « Diamond Day » de Vashti Bunyan ou « Oblivious » d’Aztec Camera. Il y a un niveau d’expression qui ne peut être atteint que sur une guitare sèche,  lorsque les doigts frappent les cordes. Ce qui est difficile à reproduire sur des instruments électriques.

Depuis combien de temps portes-tu en toi  les neuf chansons de ton nouvel album?

Pas si longtemps que cela. A un moment, au cours de l’année 2019, je me suis posé et les chansons sont venues comme cela en une séance.

Les paroles de tes chansons reflètent parfois la mélancolie, la fragilité mais pas seulement. Les émotions personnelles t’ aident-elles à écrire des chansons? De quoi t’ inspires-tu ?

En tant qu’auteur-compositeur, je peux puiser dans ma propre vie, mes observations de l’esprit humain et tenter de tout rassembler de manière poétique. Je m’inspire du banal, du calme du matin, du changement de lumière, ou encore des livres sur mon étagère.

Ecrites avant le confinement ces chansons sont traversées par la lumière et l’ouverture et peuvent être vues comme une réponse à la claustrophobie et à la matité actuelles. Penses-tu que la musique doit être considérée comme un besoin fondamental et pas une simple nécessité?

Pour nombre de personnes, oui. Et je me compte parmi celles-là. La musique est un excellent échappatoire. Le temps semble être alors comme suspendu. Comme je ne bois pas, ni ne prends de drogue, c’est le meilleur moyen que j’ai trouvé pour m’évader quand j’en éprouve le besoin.

La période actuelle a été synonyme de renoncement pour certains, de création pour d’autres. Comment y as-tu fait face?

Au cours des douze derniers mois, j’ai eu du mal à trouver du temps  libre pour écrire car le bien-être de ma famille devait primer. En même temps, avec mon amie Anna Sheard, nous avons sorti un nouvel album de Snowgoose, The Making Of You, en mai 2020, juste au début du confinement … ce qui a été une grande satisfaction même si nous n’avons pu faire aucun concert.

« J’ai toujours été attiré par la musique enracinée dans le folk, que ce soit « Blackbird » des Beatles, « Diamond Day » de Vashti Bunyan ou « Oblivious » d’Aztec Camera »

En tant qu’artisan de la musique, considères-tu que, pour paraphraser la devise du mouvement esthétique de la fin du XIXe siècle, la musique ne doit être faite que pour la musique?

La musique et l’art peuvent exister dans un splendide isolement et être adorés de loin, mais je crois que c’est à l’artiste de décider ce qu’il veut en faire. Cependant, il est parfois nécessaire d’avoir un vision plus terre à terre de l’art. Comme tout autre artisan, je dois aussi pouvoir vendre et gagner de l’argent pour payer les factures et être en capacité de m’offrir de nouvelles sessions d’enregistrements. La nécessité de nourrir ma famille ne me permet d’avoir une vision élitiste de mon travail.

Mais oui, je veux que mes chansons soient belles. C’est le premier et le plus important des critères pour moi.

Ton disque est  publié au format ELp. Pourquoi avoir choisi ce format, et non le format Lp?

Le format ELP est un format que Violette Records utilise beaucoup. C’est à mi-chemin entre un EP et un album complet. C’est un excellent format – cela me rappelle les vieux 78 tours. Parfait pour présenter de nouvelles musiques et des artistes.

Tu as déclaré que Violette Records était le seul label avec lequel tu voulais travailler. Quels sont les avantages pour toi de travailler avec eux ?

Violette a une belle éthique . Une grande attention est portée aux détails et l’artiste est considéré avec énormément de respect. En fait, il s’agit plus d’art que de commerce … Ce qui est une bonne chose car si l’art est célébré correctement, le public appréciera l’effort déployé par toutes les personnes impliquées dans le projet et in fine achètera la musique!

As-tu l’intention de continuer à travailler en solo ou avez-vous déjà d’autres projets collaboratifs en tête?

J’aimerais pouvoir faire les deux. J’ai beaucoup d’idées qui pourraient fonctionner pour moi mais qui ne conviendraient pas nécessairement à quelqu’un d’autre, notamment au niveau du chant.

En même temps, j’adore travailler avec Anna dans Snowgoose. Sa voix a été ma muse inspiratrice pour le premier album Harmony Springs. Il y a une grande confiance entre nous et nous aimons ce travail à quatre mains. Tout récemment, j’ai recommencé à écrire avec elle en vue de commencer à enregistrer le 3e album de Snowgoose cet été. Et tout paraît couler de source et sans effort…

copyright : Brian_Sweeney

Envisages-tu  de partir en tournée pour promouvoir ce tout nouveau disque, et pourquoi pas venir en France, dès que les conditions sanitaires le permettront ?

J’adorerais aller en France pour jouer, ou n’importe où  d’ailleurs ! Mon premier groupe à l’école s’appelait The Eiffel Towers. J’ai toujours eu une affinité particulière pour tout ce qui est français… alors oui, pourquoi pas?

Ton disque s’intitule When I Mean What I Said. As-tu l’impression d’y avoir mis tout ce que tu voulais dire?

Parfois, je me dis : « Est-ce que je ne serais pas en train de me répéter? » Mais alors une mélodie surgit dans mon esprit, puis quelques bribes de paroles qui deviennent la ‘crystal seed’, la base d’un nouveau morceau.

Une dernière question pour le musicien que tu es. Si tu ne devais garder qu’un seul instrument, quel serait-il? Et pourquoi ?

Je ne possède pas beaucoup d’instruments et je n’ai qu’une seule guitare acoustique. C’est une vieille électroacoustique Takamine Dreadnought que j’ai achetée à Seattle en 1991. Elle s’est patinée avec l’âge, tout comme moi.

When I Mean What I Said de Jim McCulloch est disponible chez Violette Records depuis le 21 mai 2021.