Et le troisième jour fut Wednesday, jeune formation indie rock par excellence qui devrait en fédérer voire réconcilier plus d’un.


Cela fait bien longtemps qu’un morceau de rock ne nous avait pas pris à la gorge de la sorte, dès les premières secondes. Hot Rotten Grass Smell, ainsi s’intitule ce fantastique brûlot signé du groupe américain Wednesday. Un titre qui étrangement nous rappelle Smell Like Teen Spirit, enfin, pas tant dans le son, plutôt dans son parfum grunge “olfactif”. Cette “odeur de pelouse chaude pourrie” (Smell), nous emporte dans un tsunami de distorsion, à la lisière du shoegaze et du son de Seattle, sur une mélodie aguicheuse mais pas putassière. Il faut dire que trois guitares occupent l’espace sonique au sein de ce quintet originaire de Greensboro, Caroline du Nord. Soit la chanteuse/guitariste et parolière Karly Hartzman, épaulée du guitariste (intermittent) MJ Lenderma, du joueur de lap steel Xandy Chelmis, et pour la section rythmique (n’oublions personne), la bassiste Margo Schultz et le batteur Alan Miller. 

Tout comme Smell Like Teen Spirit sur Nevermind, Hot Rotten Grass Smell ouvre magistralement Rat Saw God, troisième album de cette formation active depuis 2017, mais passée honteusement sous nos radars. Jusqu’à ce que le label Dead Oceans, au flair toujours très développé (Phoebe Bridgers, Shame, Kevin Morby…) s’en mêle, les signe et réédite d’ailleurs aussi dans la foulée leur deuxième album. Rat Saw God est indéniablement leur opus plus abouti, mais si vous vous promenez sur leur Bandcamp, vous constaterez que certains premiers morceaux possèdent déjà ce petit quelque chose d’irrésistible, ce talent de l’accroche”, en dépit d’une production pas toujours à la hauteur.

En tous les cas, la marge de progression surprend sur cette galette clairement estampillé “indie rock”, une dissonance gorgée de mélodies accrocheuses. Comme nous le soulignions au départ, Shoegaze et Grunge, font partie du vocabulaire de nos “mercolediens”, mais on reconnait aussi au fil des plages des touches country/folk alternative (Formula One, exhale le parfum doux de Sparklehorse), du slowcore voire du rock slacker (“Got Shoked”, impérial).

 “Bath Country” possède un petit côté Weezer période Schtroumpf, le brin de voix détachée de la touchante Karly Hartzman, et ses paroles à la première personne narrant son quotidien et ses relations personnelles. “Bull Believer”, use de la fameuse dynamique nirvanienne, couplet calme/refrain abrasif, avec une fraîcheur juvénile qui nous change la donne. On pense aussi parfois à Hole, pour ces mélodies pas trop propres mais tellement irrésistibles, toutefois la palette sonore du groupe est plus large, et prend même parfois des risques. A vrai dire, si on devait choisir l’affiliation de Karly Hartzman avec une Courtney, ce ne serait pas Hole mais plutôt Barnett. Mention spéciale à “Quarry”, qui emprunte sa mélodie à “Waterloo Sunset” du grand Ray Davis, mais badigeonnée de distorsion bien grasse, le tout interprété avec une sincérité tellement désarmante, que nous nous abstiendrons de crier au sacrilège. 

Dans la culture catholique, le troisième jour est souvent considéré comme celui de la résurrection. Wednesday, pourrait bien prétendre à la résurrection de l’indie rock. Et on veut bien y croire.

Dead Oceans – 2023

https://wednesdayband.bandcamp.com/

En concert le 1er juin à L’international, Paris

Tracklisting :

1. Hot Rotten Grass Smell
2. Bull Believer
3. Got Shocked
4. Formula One
5. Chosen to Deserve
6. Bath County
7. Quarry
8. Turkey Vultures
9. What’s So Funny
10. TV in the Gas Pump