Un groupe de musiciens protégés du couple qui a donné naissance aux Deschiens, ça (d)étonne. Certes, on connaît le goût des Deschamps-Makeïeff pour une musique iconoclaste et chétive, essentiellement visuelle et basée sur l’accordéon, aussi est-on en droit de s’interroger. Et la surprise est à la hauteur, car nous voilà avec un disque au titre aussi long qu’incompréhensible, Gee Whiz But This Is A Lonesome Town et dont le premier titre, « Jimmy », une chanson folk classique, mélancolique et terriblement touchante, vise en plein coeur. Portée par la voix puissante et onirique de celle qui se fait appeler Rosemary Moriarty, habillée de guitares perdues et guidée par un harmonica louvoyant, cette folk nous ramène immédiatement au meilleur de Tarnation. Mais alors que se déroule doucement le disque, entre folk et cabaret lunaire, on ressent un léger malaise. Certes les mélodies sont poignantes, les instrumentations précises et séduisantes, les histoires ancrées dans la tradition. Mais il se dégage de Gee Whiz… une impression tenace de superficialité, un ton faux. Et on comprend que cette folk est bien trop propre pour être authentique. C’est un peu comme si Diana Krall reprenait « Strange Fruit », le décalage entre un texte horrible et cru et son interprète sirupeuse et bourgeoise, bien que dotée d’un joli brin de voix, serait tel qu’on n’y croirait pas. La douleur y est surjouée, les paroles calquées sur des gammes scolaires, même le son granuleux est reproduit dans ses moindres clichés. Aussi, ce disque aux qualités intrinsèques indéniables est probablement voué à un succès critique certain dans la presse-qu’il-faut-lire et mènera le groupe sur le plateau de Taratata (d’ici deux ans, délai raisonnable pour Nagui). Nous comprenons mieux le choix de leurs parrains Deschiens, rois de la parodie populo perchés sur leur promontoire BCBG. Et nous ne retiendrons de Moriarty que le côté arty, à deux doigts de crier au sacrilège.
– Leur Myspace
– Post Scriptum, janvier 2008 : la preuve par l’image, ici même, dans un délai plus court que prévu toutefois…