Le « silence vierge » est celui de l’immobilité et de la pureté, de l’irréprochable et de l’absolu. Or on sait depuis John Cage que ce dernier n’existe pas car même lorsqu’il n’y a pas de son, il y a toujours quelque chose. Mais l’épreuve empirique s’arrête là où la croyance et la foi prennent la relève : le silence absolu devient celui de la Vierge Marie, plus « pure » que les paroles des hommes, plus modeste et plus profond. Ce n’est pas un « silence de bégaiement et d’impuissance » mais bien celui de « lumière et de ravissement » comme le disait le cardinal Pierre de Bérulle au XVIIème siècle. Richard Vergez, musicien basé aux Etats-Unis, avec son projet Drowning The Virgin Silence modifie le point de vue habituel et pose la question du son et du silence à l’envers : ce qu’on entend à l’écoute de Beneath The Sulfur Sky n’est évidemment pas le silence « pur », mais c’est ce qui n’arrête pas de le traverser. Au commencement sont des notes de guitares rappelant l’espace humide et l’horizon perdu des westerns. A travers ce décor se font entendre un transistor cherchant désespérément un signal et des cris de mouettes. “We Twist the Sun and Sea” inscrit d’emblée un contexte dépaysant et lointain. On hésite à avancer sous son ciel gris : si Beneath the Sulfur Sky possède des mélodies simples (“Riverman”, qui n’est autre qu’une reprise de Slowdive) ou des jeux de guitares répétitifs et hypnotiques (“Birds Fly”), les textures rugueuses d’un Tim Hecker ou de Christian Fennesz n’y manquent pas (“White Skin Sun”, “The Gospel”). Elliptique et profondément hétérogène, l’environnement sonore de Beneath The Sulfur Sky apparaît comme une structure vivante, évocatrice d’images et où la composition devient une question négative, posée entre deux silences.
– Le site myspace
– En écoute : “We Twist the Sun and the Sea”