Réunion au sommet de quelques illustres paysagistes de la frange ambient/post-rock US, ce premier album est une belle réussite.
Vous aimez les maths ? les équations ? Si votre chroniqueur vous demande de résoudre l’équation suivante en trouvant l’inconnu : Labradford (3 – 1) + Pan American (1 +1) = 2 +1 (?), sauriez-vous y répondre ? Non il ne s’agit pas de faire une réponse style si Labradford = 2 et Pan American = 2 alors l’addition des deux devrait donner un nombre au moins égal à 4. Que nenni. Votre chroniqueur, dans sa grande mansuétude, vous évitera de longues heures de tergiversation inutiles en vous donnant la réponse immédiatement : Labradford + Pan American = Anjou.
Ahhhh ouiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiiii, mais c’est bien sur me direz-vous.
Anjou, puisque c’est bien du groupe des deux ex Labradford (Mark Nelson, Robert Donne) et de la totalité de Pan American (Nelson donc et S.R Hess) dont votre chroniqueur parle, vient de sortir, il y a quelque semaines, son premier album.
Et comme vous pouvez le deviner, il ne fait pas dans le post-hardcore ou le black shoegaze mais creuse le sillon déjà bien entamé par les deux entités dont il est issu : glitch, ambient, post-rock (Talk Talk/Bark Psychosis dans tous les recoins de « Sighting » et « Readings » par exemple), Anjou déroule tout au long de ces huit morceaux qui composent ce premier album un paysage sonore d’une grande beauté, tout en tension. (« Inclosed » notamment) parfois en désolation (les glitch d' »Adjustment ») mais en tout point fascinant et passionnant (comme peuvent l’être les grandes oeuvres ambient). Évidemment chacun serait tenté avec ce court résumé de ne voir en Anjou qu’un succédané de Labradford, le groupe s’amusant par ailleurs à explorer les mêmes recoins d’un territoire qu’il a créé et maîtrisé il y a quelques années. Pourtant, plus que feu la formation post-rock emblématique du label Kranky, c’est plutôt de Troum dont se rapproche le groupe : notamment dans cette façon de créer des ambiances anxiogènes, inquiétantes en n’utilisant aucun sample, pas d’électronique, seulement de l’organique.
Rien qu’avec une formation presque classique (guitares/basse/batterie) et quelques changements de fréquences, Anjou façonne un disque à la fois inconfortable et d’une douceur troublée, statique en surface pour qui y prêtera une oreille distraite mais en mouvement constant, d’apparence ennuyeux et pourtant constamment fascinant, parfois austère mais très abordable car d’une belle musicalité et surtout d’une grande limpidité.
En somme, Anjou avec ce premier album, parvient à redéfinir les contours de sa musique et se créer une identité propre, cohérente, en allant puiser dans le dark ambient sans pour autant perdre les fans de la première heure. Et ce grâce à une belle exigence qui demande beaucoup à l’auditeur mais finit par le récompenser de fort belle manière avec un album d’ambient fort réussi. Probablement un des musts de 2014 en attendant, justement, le prochain album de Troum.