Une étoile filante vient de passer sur la galaxie Trip hop. Stargazing, troisième oeuvre originale du collectif bristolien Alpha, est une grande réussite qui parvient à délier les pièges des opus précédents. C’est 3D qui doit ruminer dans son coin.


Contrairement à la vague d’éloges reçu en leur temps, les deux premiers albums d’Alpha ne m’avaient pas trop enthousiasmé. Les prouesses en studios et le surplus d’arrangements de cordes – spécialement sur The Impossible Thrill– avaient à mon humble avis, tendance à noyer les chansons. Mon coeur penchait d’avantage sur des formations comme Archive ou Goldfrapp, qui parvenaient avec un certain succès, à laisser respirer les mélodies, contrairement au duo bristolien, qui semblait empêtrer dans ses ambitions de grandeur.

Une opinion qui ne remettait aucunement en question un talent indéniable à assimiler une technique de sample moderne avec l’héritage d’un Bacharach, Jack Nitztsche et consorts. Il manquait juste ce petit grain de sel qui aurait pu faire la différence face aux autres formations évoluant dans la même sphère musicale. C’est donc avec quelques à-prioris sceptiques que je glissais pour la première fois ce nouvel album dans mon lecteur. Après une première écoute distraite, une seconde – plus attentive – me surprend agréablement. Le groupe a revu à la baisse ses ambitions de pop spectoral.

Tout d’abord, il faut saluer Alpha pour avoir le don d’intituler génialement ses albums, une véritablement incitation au voyage : Come From Heaven et The Impossible Thrill et aujourd’hui Stargazing. Non, Stargazing, n’est pas un hommage au mouvement Shoegazer, mais une odyssée vers la voix lacté et ses mystères profonds. L’implosion du mythique label Melankolik semble avoir eu des répercussions sur la manière de travailler des deux mentors Andy Jenks et Corin Dingley, qui ont cependant continué de travailler dans leur propre studio. La différence notable sur ce nouvel album, c’est cette dimension soul, bien plus insistante. Les chansons sont du coup moins orchestrées que sur les deux productions précédentes.

Difficile de pondre une oeuvre cohérente lorsqu’on travaille avec un collectif disposant de pas moins de quatre chanteurs. L’alchimie fonctionne pourtant ici parfaitement bien. Sur « A Perfect End », la voix d’Elen White flotte au-dessus d’un nuage de cordes salvatrices. Sur « Waiting » également, la fidèle colombe blanche tire toujours son épingle du jeu sur des arrangements de cordes monumentaux qui côtoient des ambiances « melankolik » pour aboutir à une ballade gravée dans l’horloge du temps.

La voix de Kevin Swaybe, le petit nouveau, apporte une coloration bienvenue à l’album. Sur « Elvis », cet ancien acolyte de Portishead parvient à imiter prodigieusement les intonations Curtis Mayfield! Le groupe se fend même d’un petit clin d’oeil tricolore avec « Vers toi », un instrumentale ou un enfant s’exprime dans la langue de Molière autour d’ambiances moins habituelles pour le groupe.

Pour conclure, Stargazing, nous procure une étrange sensation de flottement, d’Ambiance nuageuses, l’impression de faire une pause intemporelle et salvatrice. 8^) Stargazing se révèle alors l’oeuvre la plus attachante du collectif bristolien. Un voyage vers l’Eden.