Si tout comme Berlin de Lou Reed, Slideling est le troisième album solo de Mc Culloch, celui-ci n’est pourtant pas son chef-d’oeuvre annoncé. Un album malgré tout honnête, possédant quelques coups d’éclats.


Voilà deux ans, notre bon vieux Ian Mc Chulloch – alors en pleine promo de Flowers, le dernier album en date des Bunnymen, se plaisait à évoquer à longueur d’interviews la mise en chantier de son futur projet solo qu’il décrivait comme son Berlin en terme d’ambition artistique. Une comparaison alléchante, mais néanmoins à prendre avec des pincettes lorsqu’on connaît la réputation légendaire du bonhomme, soit la plus grande gueule britannique en activité depuis Churchill. Quoi qu’il en soit, chaque retour médiatique de cette personnalité attachante (avec ou sans Will Sergeant) est un événement en soit, attendu unanimement par la presse rock internationale.

Depuis le come-back rédempteur d’Echo & The Bunnymen en 1997 avec le doublé sublime Evergreen puis What Are You Going To Do With Your Life(1999), le groupe de Mc Culloch et Will Sergeant était redevenu un des plus scintillants bijoux de la trésorerie pop Britannique. Maintes fois copiés, jamais égalés, Echo & The Bunnymen était la preuve vivante que de vieilles rock stars adulées en leur temps puis tombées dans l’oubli pouvaient redevenir un groupe de premier plan (tout comme Aerosmith, non je plaisante).

La bonne étoile de l’éternel dandy à la voix de velours continu donc de briller, malgré un dernier album, Flowers, un peu en pilotage automatique. Ce dernier ouvrage laissait la fâcheuse impression d’admirer la carlingue rutilante d’une porsche qui sur circuit prenait un malin plaisir à ne pas exploiter les fabuleuses capacités motrices de l’engin.

Si tout comme Berlin de Lou Reed, Slideling est le troisième album de Mc Culloch, celui-ci n’est donc pas son chef-d’oeuvre annoncé. Pourtant, il s’agit bien de son meilleur album solo « officiel ». Je dis bien officiel, car son véritable magnum opus solo est déjà sorti voilà quatre ans, estampillé sous le logo « Bunnymen » : le salvateur What Are you Gonna Do With Your Life. L’illustre figure 80’s jouait alors un sale coup à son vieux compère Will Sergeant en commettant un véritable hold up guitaristique, mais il en résultait une oeuvre poignante, succession de ballades crève-coeur comme seul les anglais savent nous en concocter.

Comparé aux oeuvres passées, Slideling est donc un album sympathique mais qui manque de caractère. La galette compte un grand nombre de chansons agréables, mais il se dégage toujours cette impression de fainéantise et de facilité. Alors, la faute à une production plate, pourtant concocté par Cenzo Townsend, responsable d’Evergreen ? Peut-être, car les restent accrocheuses, mais aucune ne font preuves d’audaces, de mise en danger comme ce fut le cas il n’y a pas si longtemps. Le coup de main des deux Coldplay Chris martin et Johnny Buckland ne semble pas avoir apporté grand chose à l’entreprise, si bien que l’on se demande où sont passées leurs parties respectives sur l’album. A l’écoute du niais « She sings (All My life) »), on se met à regretter le temps des orchestrations ambitieuses d’un « Altamont », « Ocean Rain » et autres standarts du groupe. Car nous ne sommes pas dupes : difficile de faire la distinction entre un album des Bunnymen et les aventures solos de son chanteur.

Malgré un bilan mitigé, on a affaire ici à une collection de ballades gentillettes, placées sous le saut du romantisme et de la nostalgie (« Playgrounds and City Parks » voir quelques références à Lou Reed sur « Baby Hold On »). L’âme des homme-lapins nous prouve qu’il est toujours un songwriter bouleversant à ses heures, le temps d’un « Kansas » et d’un « Slideling » revigorant. Détenteur d’un héritage de plus en plus lourd à porter au fil des ans, Mr Culloch serait-il retombé vers une option de facilité?

Finalement tout le dilemme repose peut-être sur la question : faut-il placer cet album à la suite du maigrelet Mysterio ou du monumental WAYGDWYL. Cela variera certainement selon les points de vue. Il faudra attendre le prochain album des Bunnymen pour être fixé.