L’un des fleurons de l’écurie Constellation revient nous hanter avec sa musique crépusculaire. Le constat est sans appel, Silver Mount Zion est actuellement le seul groupe de l’écurie canadienne à se remettre en question et chercher de nouvelles explorations sonores. Nous nous en délectons d’avance.


Enregistré à Montréal, courant 2002, après un an de tournée mondiale avec Godspeed You Black Emperor !, le troisième album de The Silver Mount Zion Memorial Orchestra porte un nom mensonger. Il n’y est aucunement question de punk rock, mais de longues trames dévastées, musique de chambre hantée par des voix pleines et bavardes dont on n’avait de mémoire jamais aperçu la couleur chez Constellation.

Il en existe que l’esthétisme du label a fini par lasser faute de répétition d’une même formule déclinée à n’en plus finir sur toutes les couleurs du désespoir : lente montée orgiaque d’un post-rock désabusé, privilégiant les détours par les bribes de dialogues enregistrées et le crin-crin de violoncelles hystériques, s’achevant sans surprise par une explosion saturée de toutes les guitares jusqu’alors bâillonnées.

Composé d’Efrim, Thierry et Sophie, membres à plein temps de Godspeed, et qui sous couvert de Silver Mount Zion peuvent se livrer à des activités plus mélodiques, mieux arrangées, mais sans perdre de vue la longueur réglementaire de quinze minutes par morceau, le groupe dissident dévoile une profonde régénération.

Son arme : une chorale bruyante aux inflexions slaves, comme issue de la vieille Russie impériale, et qui atteint son paroxysme sur « Babylon was built on fire/Starsnostarset » et son lent final barbouillé et satanique de voix comme échappées de l’esprit malade de Matt Elliott (Third Eye Foundation), à peine soutenues de quelques arpèges de piano et d’un violon morbide.

Le reste de l’album s’avère moins surprenant et frise ça et là le mauvais goût. Déstabilisé par le départ de ce coeur souverain, le groupe se livre à de longues errances cauchemardesques, d’une texture plutôt calme, et abusant des miaulements. Le timbre d’Efrim évoque celui de Roger Waters, époque The Final Cut. L’ambiance est similaire : déchirement d’une âme perdue luttant contre la folie galopante, repoussant à force de tiraillement de cordes vocales les instruments qui n’ont de cesse de venir raviver des mirages indésirés.

Everybody gets a little lost sometimes, apprend-on, répété à l’infini en guise de conclusion. This is our Punk-Rock dépeint la jouissance, le cauchemar, et la prostration qui la suit, un soufflé dont on préfère l’apogée plutôt que le déclin.

-Le site des Silver Mt Zion