Non, ce n’est pas d’Espagne mais plutôt de Belgique que nous vient ce fascinant groupe, combinant à merveille climats post-rock et guitares mélodieuses. Une réelle bonne surprise.


Un ciel bleu intense, des musiciens tapant le boeuf sur un nuage : avec une pochette pareille qui rappelle les premiers bricolages des défunts et regrettés Pavement, on se dit qu’on va se sentir d’entrée à l’aise avec ce petit groupe issu de Belgique. On se sent encore mieux lorsque l’on se penche sur les crédits avec la mention « please copy this music (unless you don’t like it) ». Un intégrisme qui fait plaisir à voir en ces temps de Gestapo « copy control ».

Aaaaa… la Belgique, pays de Deus, Soulwax et Girls in Hawaii plus récemment. De bien beaux souvenirs en somme. De portables est donc une formation de Bruges installée à Gand qui existe depuis 1996 et a déjà publié deux albums et une bonne poignée de Ep. Le groupe se focalise autour de deux membres, Ingwio D’Hespeel et Hans Gruyaert, mais a longtemps complété et bouleversé son line-up au fil des années. Il semble que sur ce nouvel album le groupe se soit stabilisé sous forme de quatuor, leur précédent album Rosegarden (2001) étant l’oeuvre d’un trio.

La musique quant à elle va faire des envieux : De Portables joue à saute-mouton avec Pinback, Guided By voices, Tortoise et Maseratti. Voilà donc un groupe qui passe sans aucun à priori et effort apparent d’une pop respectable à un post-rock dense. Peut-être que sur papier tout cela pourrait laisser septique, mais au vu du résultat, on se dit que ce groupe pourrait bien être « le » groupe idéal, celui qui va mettre tout le monde d’accord.

Aux premiers abords, De Portables semble donc un groupe de rock comme les autres, mais à y voir de plus près, on se dit que le terme « collectif » serait plus approprié.
-Tout d’abord, en parallèle à leurs boulots respectifs (deux membres du groupe sont professeurs) chaque musicien possède une foule de side-project dont on n’a jamais rien entendu par nos contrés, mais qui semblent bien finir par converger autour d’un projet solide, De Portables donc.

-Enfin, seconde impression qui confirme ce sentiment de collectif : la polyvalence. Ici, chacun jongle avec les instruments comme bon lui semble : Bertrand Lafontaine (guitares, basse, batterie, claviers, chant, xylophone, loops), Hans Gruyaert (batterie, guitares, claviers, basse et flûte traditionnelle bulgare (((il faut le mentionner, c’est important:))), Jürgen De Blonde (basse, électronique, guitares, vocaux, basse, clavier)
Ingwio D’Hespeel (guitares, basse, batterie, claviers, électronique). Avec une telle armada interchangeable, c’est sûr que les problèmes inhérents aux groupes de rock conventionnels (du style le bassiste qui se casse en pleine tournée) doit être le cadet de leurs soucis.

Pratiquement rien n’est à jeter sur Girls Beware!. Tout démarre dans une veine très post-rock, une ouverture biscornue dans l’esprit de Tortoise qui enchaîne de suite avec un pur instant de pop, « How it feels », croisement improbable entre les Lemonheads et les Papas Fritas. Suit ensuite « Hawaii » (hommage aux confrères de Girls in Hawaii?), encore un petit joyaux pop très porté sur la lévitation. Moments de délicatesse, « Bert tres emo », balance entre une guitare acoustique et quelques plages de synthés symphoniques. Tout semble agréablement pesé, les guitares n’en font pas trop, le chant rappelle le grain d’Evan Dando, un peu nonchalant mais séducteur.

Puis viennent les titres plus portés sur l’instrumental et les dérivations post-rock. Le triptyque « Flash », dispersé au début, milieu et fin de l’album, procure à l’ensemble une cohésion et un fil conducteur plutôt réussi, se laisse écouter, mais le meilleur reste à venir. La pièce de résistance dure de près de huit minutes et se nomme « Attack of the drones » : De Portables transforme ici la matière en quelque chose de radioactif où, au beau milieu de ses terres arides, un saxo tente de ressusciter l’esprit de Coltrane. Génial.
Juste au moment ou l’on pensait que nos amis belges étaient définitivement partis vers les sphères de l’hyper espace, le spectre pop revient prendre possession du groupe sur « Anal intruder » et « Happy with the way things » (très « Airien » pour le coup ). Vraiment, ils ont pensé à tout. Un sans faute donc.

-Le site officiel de De Portables

-Le site de Kraak Records

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