Gilles Peterson use de ses connaissances pour nous faire partager son amour et sa passion de la musique brésilienne. Pour tout novice en la matière, c’est une très succulente mise en appétit. Pour les autres, c’est une partie de plaisir.


Gilles Peterson est un DJ pas comme les autres, et si vous n’en avez jamais entendu parler c’est probablement parce qu’à travers le terme DJ on entrevoit très vite une boîte de nuit jouant de la musique pour drogués en puissance, quand ce n’est pas à une rave sous un pont d’autoroute…

Non, ici point de ça. Gilles est connu et reconnu dans le monde du funk et du jazz car il a contribué à faire connaître des artistes issus de labels comme Talking Loud ou Acid Jazz (Roni Size, NuYorican Soul, The Young Disciples pour n’en nommer que quelques-uns).

Et s’il y a bien une musique qui depuis le début a toutes les faveurs de Gilles c’est bien celle qui provient du Brésil. Il l’a déjà démontré à tort -et à travers- lors de ses émissions radio sur la radio pirate londonniene Invicta et plus particulièrement lors de son émission Worldwide (diffusée sur Radio Nova).

Il était donc temps selon lui de rendre à César… et c’est donc via ce double CD que Gilles Peterson rend hommage à un genre musical méconnu en Europe car trop vite estampillé ‘Made in Brazil’ et qui pourtant comporte maints et maints styles différents qui dépassent l’image réductrice que d’aucuns peuvent en avoir et qui se résumerait à la samba ou à la musique du carnaval de Rio. Si vous voulez vous faire une meilleure idée de ce à quoi la musique brésilienne peut ressembler, autant faire confiance à Gilles Peterson.

In Brazil est un double CD. Le premier disque, « Classico », comme son nom l’indique, compile des titres du cru années 60 et 70 qu’affectionne particulièrement le DJ. Le premier titre, de Wilson Simonal, « Nem Vem que nao tem », donne méchamment envie de commander un caipirinha et de se trémousser avec une belle brésilienne issue de la dernière campagne H&M… Le deuxième titre, des Golden Boys, brouille plus sincèrement les pistes et l’on note comment les années 60 ont influencé chez nous des artistes comme Serge Gainsbourg. En règle générale, les titres font tous penser à la bande originale de Cidade de Deus, le dernier fim brésilien qui a défrayé les chroniques au festival de Cannes en 2003. Et pour cause, le titre de Tim Daia par exemple figure sur cette dernière.

Ce premier CD est en tout cas fortement varié, car l’on passe du style enlevé guitare en bandoulière à la (Gilberto Gil de Djavan au style carnavalesque et enjoué de Os originals da Samba ou au style incontournable de Tom Jobim qui mixe la musique classique aux percussions de O Povo Canta : toutes les sonorités du pays se trouvent sur ces trois morceaux ! Sans oublier des styles débarqués et revisités tels le jazz dans « nana » de Os Cobras ou dans « Imprevisto » de Bossa Tres.

Le deuxième CD, Da Hora, qui veut littéralement dire ‘de maintenant’, apporte le know how de Gilles Peterson ainsi qu’une immersion dans la musique brésilienne contemporaine. En bref, après le passé, le présent. Tout en privilégiant, bien entendu, les sonorités latines, le deuxième CD peut parfois s’apparenter aux disques trip-hop que ne renieraient point Kruder & Dorfmeister ou The Thievery Corporation, que ce soit le langoureux « Mandingueira » de Bid ou « Bob » d’Otto avec Bebel Gilberto. Ce dernier titre est tout bonnement fabuleux d’ailleurs, avec sa basse ronde et chaude, à écouter très fort…

Le jazz, déjà présent à la fin du premier CD, est ici largenent présent, avec trompettes, contrebasse ou flûte. Les dons de mixage de Gilles sont démontrés sur des titres comme « Green Gold » de Spiritual South ou « Futebol de bar » de Cesar Mariano. Et c’est ce qui fait, en somme, de ce CD plus qu’un simple CD : il peut aisément tenir le haut du classeur car ce style ne connaît pas les aléas du temps et a le don de vous coller un beau sourire sur la face.

Le site de Gilles Peterson