L’adage-credo de The Knife annonce haut et fort – et très clairement – l’objectif ambitieux de ses troubadours des temps modernes : « Most art (and music) is shit. But it’s worth listening to and look at, ‘cause when you finally see something you like, it’s fantastic. »


theknife_01_t.jpg Passé cette intro de leur bio pour le moins prétentieuse et fouteuse de merde – excuse my french – mais prêtant à sourire, la pochette complètement rétro, la photo de la formation dans le livret (maquillés et surtout méconnaissables), ainsi que leurs clips finissent d’abrutir les quidams que nous sommes. Derrière The Knife se cachent un frère et une soeur – Olof et Karin Dreijer – qui ont décidé que le rock était mort, et que l’électro – exclusivement – représentait l’avenir de la musique. Rien que ça tiens!

Il s’agit ici de leur deuxième album, qui surfe à fond la caisse sur la vague des golden eighties et trash nineties, version ringard. Entendez par là paillettes, fioritures, maquillage à outrance (comme Kiss) et poses rappelant le petit monde enchanté du Cabaret. Ils ont pourtant décidé de ne pas se donner en spectacle : le live ne les intéresse guère qu’ils disent. En voici la raison invoquée : sous prétexte de contester le système dans sa globalité, et le milieu du show-bizz en particulier, le duo a décidé de ne pas se montrer, afin, dit-il, « de privilégier la musique plutôt que l’image ». Ce qui est volontairement ironique ici, c’est qu’ils se servent merveilleusement bien de l’image pour faire passer leur message.

D’après votre serviteur il s’agit surtout de se faire remarquer. Voilà, le mot est lancé, car c’est de ça qu’il s’agit. La preuve? Ils n’ont pas hésité à envoyer deux parfaits inconnus déguisés en gorille aux Grammy awards de Suède en leur lieu et place. Résultat : toute la presse suédoise en a fait un article. Malin. Ce ne sont peut-être pas les premiers ni les derniers à faire ce genre de mascarade pour qui sait tirer à profit des lois du visuel, mais force est de constater qu’aujourd’hui il faut innover si on veut se démarquer du lot, et chaque chroniqueur sait que ce n’est pas une tâche facile à voir la pile de CD qui ne demandent qu’une chose : être achetés! Les paroles cherchent à se faire remarquer également : « I Keep my dick hangin’ out of my pants« . C’est cela oui…

Visuel avons nous dit donc. En effet, que penser du clip de « Pass this on » (présent sur le DVD bonus)? On pense à The Aphex Twin dans cette façon à la fois dérangeante et marrante de présenter les choses : un travelo chante et se trémousse devant un parterre hétéroclite et finit par séduire le fameux frère (« I’m in love with your brother, what’s his name ») qui se déambule face à elle (lui) comme si sa vie en dépendait. Le clip de « You take my breath away » semble quant à lui exploiter le kitsch nordique des chansons populaires de Abba.

Musicalement – ce qui nous intéresse – on plonge donc dans les entraves de la musique électronique la plus craignos (mais tellement à la page), qui va chercher les sons les plus artificiels, voire farce, qui soient (on pense notamment à 2 Unlimited pour les nappes synthétiques – encore des nordiques si mes souvenirs sont bons -). Mais ce qui est très intéressant, c’est que ce n’est pas dénué de talent tout ça. On se surprend à fredonner tel air ou à vouloir réécouter tel autre (c’est vrai pour les simples « Pass this on », « Heartbeats », « You take my breath away »). A tenter de reconnaître dans quel titre des années 80 on a déjà entendu ce son-là, ou celui-là (il y en a certains qui ne m’ont toujours pas apporté satisfaction d’ailleurs – j’hésite entre Howard Jones et Jimmy Cliff, tout en pensant à Miss Kittin…). Le genre de disque qui fait réfléchir, et qui – du coup – marque. Car non seulement il est plaisant d’écouter « Handy-Man » ou « Pass this on », mais de plus ça donne envie de danser. Et ce côté acidulé, mélange de sérieux et de festivité joyeuse finit de nous convaincre.

Le chant de Karin est très varié, scrutant plusieurs timbres de voix, même celui de Björk période Sugarcubes – encore une nordique – qui donnent à croire qu’il y a plusieurs invités qui chantent sur ce disque. Il n’en est rien : c’est elle et elle seule.

Ce qui m’a énormément séduit dans ce disque c’est un côté très Klaus Nomi – à savoir une belle mélodie entourée de guirlandes crasseuses -. Plus on l’écoute, plus on l’aime ce disque!

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