Panda Bear, membre d’Animal Collective, vient d’enregistrer son premier album solo, qui se révèle en fait être le deuil de son père concrétisé sous une forme musicale. Vous avez dit bizarre ?


Appartenant à la très prisée catégorie des « inclassables », Animal Collective, collectif de Brooklyn, nous a sorti quelques purs ovnis folk ces dernières années. Here COmes The Indian par exemple, album totalement déconcertant à la première écoute, se situant quelque part entre du folk, de l’electro et du son psychédélique et dérangé. Dans un style plus céleste et également plus accessible, Campfire Songs et Sung Tongs, sortis tous deux cette année, ont fait connaître le collectif au monde entier, en servant une tripotée de morceaux tous aussi sublimes les uns que les autres.

Noah Lenox, alias Panda Bear, membre actif du collectif sus-cité, a perdu son père il y a peu de temps, cette expérience douloureuse s’est matérialisée sous la forme d’un disque très intime. L’album, ou plutôt l’EP pourrait-on dire, vu qu’il ne dure que 28 minutes, a de quoi réellement déconcerter. La première écoute s’est avérée catastrophique, laissant un goût de mauvais Sung Tongs dépouillé au maximum. Mais, une fois n’est pas coutume, il faut savoir laisser du temps à un disque pour pleinement l’apprécier.

Après une dizaine d’écoutes, il apparaît clairement que ce disque est à réserver aux oreilles averties. Si vous n’avez jamais pu vous faire aux excentricités electroniques d’Animal Collective, passez votre chemin, vous n’avez rien à faire ici. Si vous avez aimé au contraire, rien ne porte à croire que vous apprécierez également le premier « vrai » album solo de Panda Bear. Car le loustic sait déconcerter son auditoire. Ok, ce disque a été enregitré durant une période de deuil, c’est même un
deuil enregistré sur un disque, mais il n’est vraiment pas simple d’accès. Ou alors, je ne prends tout simplement pas les mêmes drogues que ces messieurs.

Pour résumer brièvement, disons que le coup d’envoi est donné avec un premier morceau (ils ne portent pas de titre)
enregistré depuis les nuages, quelques notes éparses de guitare pincées avec légereté, une voix qui incante plutôt que chante, le tout étant empreint d’une grande mélancolie. On pouvait s’attendre à du death metal sur le morceau suivant, mais ce n’est pas le cas. Disons que si on ne fait pas attention, on n’est pas censé noter le changement de morceau. Cela reste dans un registre très religieux. Brian Wilson et ses Beach Boys ne sont pas loin en ce qui concerne la façon dont est orchestrée la voix : on a l’impression qu’elle se propage comme une onde ouatée tout autour de soit, qu’elle vous enveloppe.

Le troisième morceau est un instrumental (piano et guitare sèche) d’une minute, très jolie transition tout aussi voluptueuse que les deux premiers morceaux. Le suivant ne mérite pas que l’on s’y attarde plus longtemps, étant strictement identique aux précédents. Bref, tout serait bien morose si notre ami Panda Bear n’avait pas retrouvé un peu le moral après de longues heures de méditations passées à penser à son papa. Du coup, il invite des copains pour venir taper dans leur mains, il se fend d’un compère au chant, et c’est reparti pour la messe, version plus Animal Collective. Mais la joie est de courte durée, car l’album se finit sur le même ton que le début, à savoir, sans vouloir faire trop méchant : légèrement morose et surtout répétitif.

Pour la petite histoire, sachez que cet album a tourné au sein de la rédaction, laissant derrière lui des visages perplexes et des oreilles touchées en plein vol. Et pourtant, on ne peut pas dire qu’ils aient peur de l’excentricité. C’est vous montrer à quel point Panda Bear interroge : mais où veut il en venir ? Lui seul le sait probablement. En tout cas, il est clair qu’avec cette album, il ne détrônera pas Limp Bizkit dans les charts, mais cela reste une expérience intéressante pour tout amateur de disques qui dérangent.

-Le site de Paw Tracks, le label de Panda bear et Animal Collective