Le meilleur songwriter de Toronto (derrière le Loner, of course) signe un nouvel album plus optimiste après le rédempteur Skyscraper national Park. Toujours coiffé de guitares envoutantes, Hayden Desser s’impose comme l’un des songwriter les plus attachant du circuit. Culte.


Il y a quelque chose de chaleureusement immédiat dans la musique d’Hayden. Quelque chose qui se jette à vous comme une gifle sur la joue et vous réchauffe instantanément. Peut-être est-ce dû à cette évocation de la nature sur ses pochettes et dessins de livret : ces caribous nobles et plus spécialement les pins de son Canada natal, ces forêts denses et verdoyantes qui entourent Toronto, la ville où il réside. Hayden ne s’en cache pas, ce végétarien prône une folk musique écolo teintée de tourments. Sur ces deux précédents albums, (le rédempteur Skyscraper National Park (2001) et le double live … At convocation Hall (2002)) la coupe d’un arbre avait été dessiné sur le CD, symbole d’un attachement écolo/baba de la part d’un jeune homme qui a fraîchement atteint la trentaine.

Après quatre longues années de retraite, Hayden Desser était réapparu en 2001 avec un troisième album magnifique, le vertigineux Skyscraper National Park. Enregistré dans des circonstances d’anonymat complet (500 exemplaires seulement avaient été pressés à l’origine), le disque a bénéficié d’un bouche à oreille conséquent pour finalement atterrir jusqu’aux oreilles affûtées de Badman Recordings aux Etats-Unis (pour mémoire le label des Red House Painters). L’homme nous était revenu plus ridé, mais c’est surtout sa musique qui semblait avoir pris 40 ans d’un seul coup, dorénavant plus alourdi par le poids des ans, Hayden se révélait bouleversant.

C’est donc avec une impatience fébrile que l’on attendait ce nouveau chapitre de l’homme aux caribous. Pourtant, procuré au cours de l’été, Elk-lake Serenade n’était définitivement pas de saison : ce nouvel effort studio laissant la désagréable impression de porter une écharpe en plein moins d’Août… Cela arrive parfois, il fait laisser un peu de temps à certaines oeuvres. Laissé donc précieusement de côté, ce n’est qu’à l’arrivée du 0° sur le baromètre qu’on s’y est replongé. Et voilà que maintenant, on n’oserait envisager de mettre les pieds dehors sans sa compagnie pour affronter la brise hivernale.

Toujours accompagné de son camarade Howie Beck, ce second album (artistiquement parlant) se veut plus optimiste et varié. Si Skyscraper lorgnait vers la passade dépressive, son successeur inclut cette fois quelques notes légères bienvenues. “Wide Eyes”, intro au piano voluptueuse accompagné de classieux violons, est une promenade dans la droite lignée du Loner, période After the Gold rush. Le fantôme du « Transformer Man » plane très fort d’ailleurs au-dessus de ce disque, un folk/rock sans fioriture qui touche droit au coeur comme une flèche plantée dans l’écorce d’un sapin. D’ailleurs au fil de l’écoute, le placement du tracklisting alterne entre intimisme folk et de véritables pop songs.

Le disque regorge ainsi de morceaux mieux ficelés à l’instar de “Home By Saturday”, ballade folk par excellence baignée sur fond de lap steel bucolique, certainement un nouveau classique dans son répertoire. Au rayon ensoleillé, “Woody”, dédicacé à son chat, est une folk song à la fois inoffensive et touchante, et ça ne fait pas mal de temps en temps. Aux antipodes, le limite rock “My Wife”, est ce qu’on peut appeler une « Accusing song », aux accents légèrement Glam et certainement la chanson la plus accessible d’Hayden depuis ses débuts. Mais le bonhomme sait toujours être aussi grinçant, comme sur “Hollywood Endings” où il tire un portrait ironique de ses relations sentimentales, sur fond de refrains de beuverie « La, La, La, La » et noyé par une trompette fraternelle.

Quelque part entre Mark Kozelek et Neil Young, Hayden s’impose durablement comme un paysagiste de premier ordre. Et on touche du bois pour que cela continue encore très longtemps.

-Le site officiel d’Hayden