L’électron libre Mike Patton a encore frappé ! C’est un album inspiré de la musique classique et d’épouvante qui arrive dans les bacs pour le plus grand plaisir des afficionados de Mike.
Alors, Mike Patton encore et toujours? Oui, le monsieur n’en est pas à son premier essai d’expérimentation sonore, loin s’en faut, et déjà son quatrième projet ne serait-ce que pour cette année 2004. Après Fantômas, Eyvind Kang et sa tournée avec Rahzel, sans compter ses collaborations ici et là (comme sur l’album de Bjork), Mike montre qu’il est un grand workholic comme disent les anglo-saxons : un féru du boulot. Le travail, toujours le travail. Alors que 2005 annonce déjà une autre galette de Fantômas et une de Tomahawk, plus une autre pour janvier intitulée General Patton vs X-ecutioners, voilà qu’en cette fin d’année il débarque avec Kaada pour Romances.
Kaada donc, est un norvégien qui a sorti son premier album, Thank you for giving me your valuable time, une sorte de méli mélo de genres et de bruits qui l’ont vu comparer à The Avalanches. Le disque était sorti sur le label de Mike Patton, Ipecac. Notons que le norvégien est surtout connu et reconnu dans son pays comme compositeur de musique de films. Ici, avec Mike, il s’est occupé du decorum dans lequel ce dernier poserait sa voix et son savoir faire. Inspiré dit-il par la musique classique (Mahler, Chopin, Brahms et Liszt) : on le sent bien dans « Crépuscule ». C’est lors de la tournée de Fantômas et des Melvins en 2003 que les bonhommes en sont venus à enregistrer dans des chambres d’hôtel les prémisses de Romances. Ils n’ont cessé ensuite de s’envoyer encore et encore des CD jusqu’à que Kaada pense en être quitte en janvier 2004. C’était bien mal connaître le sieur Patton, qui répondra par un mail de 16 pages par la négative, détaillant tous les points qui selon lui méritent perfectionnement et amélioration. Croyant enfin avoir obtenu le meilleur, il en aura pourtant pour ses frais : c’est huit mois qui vont être nécessaires pour obtenir le disque qui sort aujourd’hui…
Disons pour tenter de résumer la situation qu’il s’agit d’une sorte de mélange entre Eyvind Kang, surtout dans les envolées classiques (notamment dans le chant), et de Fantômas dans cette angoisse toujours en filigrane, qui pourrait tellement se prêter à un film d’horreur ou d’épouvante. « Nuit silencieuse » – tous les titres sont en français dans le texte, histoire d’honorer la musique française 1800 -, avec son piano et ses chants apocalyptiques diffusent une peur palpable du plus bel effet.
Des titres plus proches de la mouvance soul-funk sont aussi de la partie : « Pensée des morts » par exemple. Cela rappelle d’ailleurs autant la période « Easy » de Faith No More que le titre que Mike reprenait cette année en live dans ce genre musical dans lequel il excelle, ce qui le rapprochait d’un Prince. A quand un album exclusivement soul-funk? Dès « Pitié pour mes larmes », on comprend que l’on aura droit plutôt au chant qu’aux gargarismes de ses deux albums en solo, et ça, ça vaut le détour car il s’agit bel et bien d’une des plus belles voix contemporaines. Elle peut même être assez enjouée comme sur « L’absent », où Mike y est accompagné comme par le Morricone de Il était une fois en Amérique. Alors, c’est vrai, on peut se lamenter de ne pas le voir sortir un disque plus classique, mettant de côté toutes ces expérimentations qui demandent un effort de concentration et de la patience… mais ce ne serait plus du Mike Patton. Alors on fait avec. Et c’est ce qui fait son charme. Eloigné des carcans de la musique actuelle, Mike prouve que bien que confiné dans son coin, au mépris des us et coutumes aux alentours, il arrive à promouvoir des styles musicaux nouveaux et à faire connaître des artistes qui valent le détour. On se rappellera que lors de l’interview de Fantômas ils déclaraient vouloir composer des musiques de films, et le voici qui collabore avec un compositeur attitré. Comme c’est bizarre…
Le site de Kaada