Le troubadour vert de Big Apple continue de déverser ses petites histoires, entre surréalisme beatnik et poésie de poubelle. Malgré quelques longueurs, l’ex-Moldy Peaches sait rester touchant.


Sympathique luron du courant underground New-Yorkais – à l’instar de son mentor Jonathan Richman– Adam Green prend un malin plaisir à afficher son visage de faux-demeuré sur ses pochettes. Si l’ex-Modern Lovers possède lui une gueule plus « propre », mine de rien, ce parti pris esthétique résume parfaitement l’univers déjanté de l’ex-Moldy Peaches.

adamgreensolo.jpgBalancé entre une réputation de petit prodige antifolk et curiosité du courant alternatif, ce jeune musicien de 24 ans suscite la sympathie des critiques et un certain engouement chez les intellectuels bobo rock, avec ses histoires trash et ses allures de poète en dilettante. A la manière d’un David Lynch, l’ex Ex-Moldy Peaches aime jouer avec les codes du politiquement correct. Derrière des mélodies souvent simplettes, il explose les conventions avec des paroles à la crudité surréaliste (on se rappelle de “Jessica”, une lovesong où le protagoniste s’entiche d’une jeune fille-tron).

Après deux albums très lo-fi et fantaisistes (Celui avec les Moldy Peaches et Garfield, son premier en solo), Friends of Mine sorti en 2003 augurait une nouvelle ère, plus professionnelle avec des chansons enregistrées pour la première fois en studio et augmentées d’orchestration. Saluée par la critique, la mascotte antifolk s’en tirait admirablement sur ce disque magnifique, parfait dosage entre mélodies insouciantes et propos comico-trash propres au personnage.

friendsofminde.jpgAvec Gemstones, troisième album attendu, le songwriting du jeune homme s’est en quelque sorte émancipé. Le détail qui frappe dès la première écoute, c’est que les mélodies sont moins évidentes que sur Friends Of Mine, pas vraiment d’hymne direct de l’envergure de “Jessica” n’émerge du lot : Green a opté pour un format de composition plus fouillé où les chansons sont maltraitées régulièrement par des alternances de tempos, procurant à l’ensemble une sensation de montagnes russes. Les cordes ont disparu et laissent davantage d’espace au piano et à la section rythmique, option certainement plus confortable pour la scène. Malgré cette volonté de casser la monotonie, les quinze titres présentés ici traînent parfois sur la longueur et auraient mérité quelques amputations malgré le format très court des chansons (la plupart des titres tournent autour de 2 minutes).

Cependant, le style de ce poète dadaiste s’accentue et les écoutes répétées finissent par payer, à l’instar du charmant titre épnonyme “Gemstones” au phrasé enfantin et le rocambolesque “Down On The Street”. On se régale toujours de ses histoires à l’humour limite macabre : sur “Carolina” et ses faux-airs de Tango, le bonhomme fait du name-dropping en citant Dostoïevski tout en dressant un portrait salace de sa dernière conquête (“she’s from Texas, red bricks drop from her vagina, oh her lips taste just like sunk ships, but her breasts taste, just like breakfast.).

On constate alors qu’à l’image d’un Lou Reed, l’ancien compère de Kimya Dawson a laissé un peu de côté sa spontanéité pop et préfère dorénavant miser sur ses tranches de vie surréalistes. Green possède toujours ce grain de voix “stoopid” à la Joey Ramone (attention, je n’ai pas dit stupide, nuance) et grâce à ce ton désuet, il parvient à faire passer sans encombre ses histoires inconvenantes. Toujours irrésistible donc, mais on aurait aimé un peu plus de fluidité de temps à autre, si on peut se permettre…

-Notre chronique d’Adam Green – Friends of mine

-Le site d’Adam Green