Le plus français des new-yorkais sort une compilation témoin de sa riche discographie, regroupant ses tubes rock’n’folk de la période 1995-2005. Agrémentée d’inédits et d’un concert filmé.
Comme pour beaucoup d’aficionados de blues, country, folk et roots en tout genre, j’ai découvert Elliott Murphy sur le tard. En 1972 alors que sortait le premier album de l’américain, Aquashow, en référence au club de jazz que détenait son père à New York, j’étais plus à me préoccuper de pousser mon vélo à roulette qu’à me passionner pour la musique. Vingt cinq albums plus tard, Elliott Murphy sort toujours des disques ce qu’atteste la sortie de la compilation Never Say Never même si l’engouement du public malgré des critiques toujours flatteuses, ne s’est pas toujours fait ressentir, surtout sur son sol natal.
Aujourd’hui, parisien d’adoption, Elliott Murphy bénéficie d’une réputation établie dans l’hexagone. Il la doit en partie grâce à Bruce Springsteen qu’il invita pour un duo dantesque sur la chanson « Everything I do (leads me back to you) » sur l’album Selling the Gold, qui devint un tube et relança sa carrière. Depuis plus de trente ans, Murphy foule les planches des scènes du monde, et bien que la presque soixantaine, notre guitariste chanteur est en grande forme à en croire la vitalité qu’il déploie pour composer et ce avec une constante déstabilisante pour ses compères en recherche d’inspiration. Qu’ils s’agisse de folk ou de rock, l’américain témoigne d’une maîtrise parfaite dans l’art d’écrire des chansons qui font mouche à chaque fois. Chargé d’émotion et de puissance troublante, chaque chanson ici regroupée montre leur auteur comme l’égal des plus grands songwriters, comparable à celles de Neil Young, Phil Ochs, Tim Rose, Fred Neil ou John Fahey. Ainsi, des titres comme « Ground Zero », « Green River », « Everything I do », ou encore « Small room » ont été enregistrées pour appartenir au panthéon du rock.
Première compilation pour le label Last Call, spécialisé dans la signature de gloires oubliées (Terry Lee Hale, Paul Roland, Alex Chilton, Chris Bailey parmi tant d’autres), toutes aussi essentielles les unes que les autres et malheureusement faisant plus souvent la joie des fouineurs de bacs à soldes en quête de trésors cachés que de leur banquier, Never Say Never couvre la période 1995-2005. Parmi dix chansons extraites des albums sortis durant ces années, Elliott Murphy nous gratifie de quatre inédits dont un « Never Say Never » et « Long Time Coming » qui feraient des tubes radiophoniques dans un monde moins frileux.
En bonus, un DVD retrace la carrière de cet artiste incontournable le capturant notamment sur scène lors d’un concert donné à Ferrara en Italie avec son groupe aux côtés du bassiste ex Modern Lovers Ernie Brooks et du guitariste frenchy Olivier Durand qui depuis l’album live April apporte un jeu innovant donnant à la musique de l’américain une certaine profondeur aérienne.
Pour ceux qui voudraient rattraper le temps perdu, le reste de sa carrière est disponible en accélérée sur le best of Going through something et Vintage Series qui regroupe son premier et quatrième album Just a story from America. Quand au classique Soul surfing, sorti en 2001, ses meilleurs extraits sont disponibles sur Never say never.
Revendiquant son appartenance à la communauté lettrée du Lower East Side et de East Village, Elliott Murphy fut remarqué pour son écriture poétique digne des Dylan et autres Lou Reed. Il écrivit ainsi les notes de pochette du Live 1969 du Velvet Underground, de la compilation Add it up des Violent Femmes ainsi que des essais sur Tom Waits, une connexion d’influences d’ailleurs très présente sur ses albums. De plus, et toujours parallèlement à son activité musicale, notre homme est un écrivain avéré dans la plus grande tradition des romanciers du sud des Etats-Unis ayant à son actif deux oeuvres littéraires Cold and Electric et Poetic justice à paraître sous peu. Et comme disait l’auteur lui-même Literature is my religion, but rock’n’roll is my addiction. Ne boudez pas le plaisir de (re)découvrir un musicien aux talents multiples.
-Le site de Last Call
-Le site de Elliott Murphy