Clem Snide, Great Lake Swimmers et Ben Weaver… trois groupes américains qui montrent une nouvelle fois que la pop comme le folk se parent de leurs plus beaux atours lorsqu’ils sont joués avec humilité et sensibilité.


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Ben Weaver – Blueslivinghollerin

Tout comme Thomas Dybdahl, Ben Weaver à 25 ans seulement réussit à merveille à faire revivre les ballades folk-blues comme on en entendait jadis chez nos grands-parents. Armé d’une guitare, l’américain part en campagne avec l’envie de montrer au monde que la force d’une musique ne réside pas forcément dans son énergie électrique. Accompagné dans sa croisade par quelques amis partageant ce même goût pour la simplicité et le dépouillement, les chansons de Ben Weaver sont nettement plus puissantes que n’importe quelles autres compositions noyées dans une production spectaculaire. Construit comme un patchwork musical Blueslivinghollerin’ est un album qui puise dans la discographie du chanteur pour en extraire les titres qui lui tiennent à coeur.
Dix-huit au total, tous venant essentiellement de ses trois premiers albums autoproduits, El Camino Blues, Living in the Ground, Hollerin’ at a Woodpecker exceptés quatre d’entre eux dont trois sont issus des sessions du quatrième album Stories under nails et une reprise de Bob Dylan « Ballad of a thin man », aperçue sur la compilation du magazine Mojo liée à la sortie de la biographie de Zimmerman.

Porté par une voix dont le timbre peut rappeler un Tom Waits en moins rauque, les chansons de Ben Weaver parlent d’une Amérique qui se bat pour trouver une dignité, une place respectable dans la société. « Living in the ground », « I cried all night », « Bill Brown » traitent de ces rapports de force qui sont le pain quotidien de ces opprimés face à un Etat qui les ignore et les a abandonnés en chemin il y a déjà fort longtemps. Les textes de Weaver se nourrissent de ces histoires tragiques de personnages qui malgré l’indigence cherchent à être méritants. Proche des univers musicaux de ses pairs George Jones, Toy Caldwell, Merle Haggard ou Rufus Payne, le jeune homme du Minnesota s’inspire aussi bien de la country music des années 50 que du folk new-yorkais des années 60. Sous des aspects austères et peu réjouissants, les chansons sont empreintes d’affection et d’authenticité qui trouvent leur écho dans la justesse des propos de l’auteur, un jeune homme qui n’hésite pas à ouvrir son coeur à qui veut bien l’entendre.

-Le site de Ben Weaver

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Great Lake Swimmers – Bodies and Minds

Moins dépouillée mais toute aussi touchante, la musique de Tony Dekker aux commandes de son quatuor Great Lake Swimmers tutoie les cimes de la légèreté. Vaporeuses à souhait, les chansons de ce deuxième opus parlent aux hommes assez sensibles pour frissonner et être envahis de ce souffle qui glisse si délicatement sur les onze compositions de Bodies and minds. Comme sur le précédent opus, inutile d’hausser la voix pour se faire entendre, les mélodies jouées en apesanteur par des musiciens à la réserve musicale éloquente retiennent l’attention. L’ambiance feutrée et intime de l’album, le silence entre les prises comme les doigts qui se posent sur les cordes sont perceptibles, donnent à l’écoute du folk des canadiens un air convivial et apaisant. La solitude des âmes émotives n’a jamais trouvé autant de réconfort que chez Tony Dekker et ses comparses.

Partagé entre des moments à la tendre mélancolie « To leave it behind », « I could be nothing » et d’autres plus bucoliques « Various stages », « When it flows », Bodies and minds est parfait pour l’avant et l’après des siestes rêveuses. Tout dans ce disque a été pensé pour parfaire les songes d’un après-midi reposant. Et pour donner du relief à cette ambiance céleste, le quatuor a investit une chapelle de l’Ontario pour y poser leur studio d’enregistrement. Solennelles et graves sans toutefois avoir un côté mystique ni verser dans un spleen cafardeux, les chansons sont teintées de cette lumière en clair-obscur qui illumine l’album du début à la fin. Touchés par la grâce, on comprend dès lors que les musiciens ouvrent l’album par « Song for the angels ». Pour flirter ainsi avec les étoiles, il faut poursuivre un niveau d’exigence que les américains ont assurément atteint aujourd’hui.

-Le site de Great Lake Swimmers

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Clem Snide – End of love

Appliqués, les membres de Clem Snide le sont également. End of love, le titre de leur nouvelle production affirme non moins la fin d’un temps que la résurgence d’un autre. Ce cinquième disque marque un tournant dans la vie d’un groupe qui n’en est pas à son premier rebondissement. Sept ans ont été nécessaires pour trouver enfin la bonne alchimie. Est-ce William Burroughs à qui Eef Barzelay emprunte le nom d’un des protagonistes du Festin Nu pour le donner à son groupe qui lui fut salutaire ? En tout cas des nuits sans sommeil aux forts arômes d’alcool et de délires poétiques aux lisières de la folie et de la sagesse, de voyages solitaires en vie collective trépidante à travers les Etats-Unis avec plus ou moins d’argent sont sûrement les points communs qui relient le chanteur de Boston au poète Beatman.

Enregistré pendant une partie de la tournée de leur précédent album Soft Spot, ce nouveau disque fut plongé dans un climat de découragement douloureux. Appelés à la rescousse, les producteurs Bryce Goggyn et Mark Nevers, artisan du son entre autres de Pavement pour l’un et de Lambchop, Calexico pour l’autre, ont su aérer les compositions de Clem Snide dont l’écriture était sombre et enlisée sur elle-même. Au final, le désespoir se ressent tout de même dans les textes de Barzelay mais la musique a su retrouver de sa brillance naturelle qui caractérise si bien la pop du quatuor. Il faut écouter fidèlement, comme on le fait dans une salle obscure pour un groupe de jazz ou de rock, les mots tourbillonner au rythme des mélodies virevoltantes pour être littéralement touché par l’émotion qui ressort de End of love. De « God answers back » à « The sound of german hip hop » en passant par « Something beautiful » on ressent un agréable frisson nous parcourir. C’est souvent dans les moments les plus douloureux que les artistes puisent au fond d’eux pour nous livrer des oeuvres animées de sensibilité. End of love mais début d’une autre histoire qui on l’espère nous réserve encore plein de bonnes surprises.

-Le site de Clem Snide

-Le site de Fargo