Le come-back de l’une des formations pop les plus attachants de la fin des 80’s. Après dix ans d’absence, l’aura du quatuor néo-zélandais est toujours là, intemporelle. Attention, chronique nullement objective.
C’est un des joyaux les mieux gardés de la noble forteresse pop indépendante. La tribu « kiwi », plus connue sous le nom du prestigieux label néo-zélandais Flying Nun, regroupa durant une bonne décennie (1983/1993) quelques uns des groupes les plus attachants du panorama pop : The Clean, Chrix Knox, The Chills, Verlaines et bien sûr The Bats… empereurs de guitares délicates et mélodies timides, une élégance d’écriture rare vénérée par des formations non moins prestigieuses comme Radiohead, REM, Luna ou plus récemment The Clientele.
Les chauve-souris de Robert Scott ont toujours été parmi nos favorites de la famille néo-zélandaise, les plus consistantes sur disque, ce malgré une discographie rachitique : six albums échelonnés sur une carrière de presque un quart de siècle, dont les dix dernières années furent totalement aux abonnés absents. Autant dire que lorsqu’on est fan des Bats, il faut savoir prendre son mal en patience et ramasser les miettes – on évoquera dans ce cas présent plutôt le terme « pépites » – chez les voisins de The Clean, autre groupe dans lequel officie Bob Scott à la basse aux côtés de Paul Kean. Mais là aussi, les considérations quantitatives sont encore moins de mise (cinq albums au total depuis 1980).
Leurs premiers albums sont tout simplement introuvables, car personne ne les revend – du moins on aime à le penser. Et c’est mieux ainsi. Car les chansons des Bats ne se partagent pas avec le premier venu. Elles font partie de ces instants de bonheur que l’on a du mal à partager et qu’on préfère conserver dans un coffre fermé à double tour, de peur que la magie ne s’évapore au contact de mains étrangères. Depuis les débuts intimistes de Daddy’s Highway (1987) en passant par la révélation Fear Of God (1992) et puis le méconnu et pas moins remarquable Couchmaster, ce quatuor n’a jamais connu de moments de faiblesse.
Une décennie après notre dernier rendez-vous, Robert Scott a collecté une dizaine de nouvelles chansons pour reformer son quatuor inoxydable, constitué du fidèle couple Kaye Woodward et Paul Kean ainsi que Malcom Grant à la batterie. Enregistré dans des conditions quasi live sur du matériel analogique « At The National Grid », semble n’avoir aucune répercussion sur le temps. Le groupe se serait quitté la veille que le résultat serait sûrement du même acabit. « Western Isles » démarre sur des bruits de studio, ambiance répétition, et puis les étincelles traversent la pièce, les instruments ronronnent, produisant cette alchimie unique. On retrouve la voix nasale de Scott, si particulière, dont l’enchevêtrement d’harmonies vocales avec Kaye Woodward demeure l’une des plus tendres choses entendues sur cette terre (Woodward est véritablement ensorcelante sur “Mir”).
Les disques des Bats ne sont pas réservés aux gâchettes rapides du web, ceux qui empilent des giga tonnes de sons dans leur disque dur. Ces chansons-là ne se consomment pas comme des produits jetables. Avis aux chasseurs : les perles sont éparpillées devant vos yeux mais demandent un minimum de vigilance, parfois on les dépasse sans s’en rendre compte, puis on y revient une semaine, voire un mois plus tard, complètement soufflé d’être passé à côté. Parmi ces trésors : « Bells » est une roublardise pop digne des Go-Betweens, une guitare acoustique en bandoulière. Certaines fois, l’élégance ranime les flâneries sentimentales du Velvet Underground Mark III. « Things », dont la fulgurance mélodique s’accélère sur la dernière ligne droite, file comme une étoile filante. Tout ici n’est que délicatesse et rêverie. Et même lorsqu’un solo de guitare Fuzz fait son entrée sur “Single File”, il nous caresse dans le sens du poil. Miaou.
La musique des Bats est l’une des plus perfides recensées. Aux premiers abords inoffensive, elle croque petit à petit toutes vos pensées pour se transformer en une véritable gangrène, une obsession de tous les instants. Il n’y a aucun antidote pour vous guérir de cette emprise, si ce n’est céder à la lutte et se laisser emporter par le flot d’émotions.
-Une page consacrée aux Bats sur le label Flying Nun
– Le site du label Magic Marker