Avec ses synthés vintage et ses guitares post-punk frénétiques, Clor revisite l’esprit clubbing des années 80. Alors, poil à gratter chic ou toc ?


A chacun sa hype ! Pendant que certains chauffent leur manche de guitare avec plus ou moins d’inspiration, d’autres lorgnent avec gourmandise sur les synthés vintage, le glitter et les pistes de danse. Clor, le nouveau phénomène « ultra tendance » qui agite la presse anglaise, ne fait pas exception à la contagion eigthies qui s’empare du Royaume Uni et vient nous dire la messe avec son credo punk-funk électro à mi-chemin entre le scintillement loufoque des Sparks et l’énergie de XTC.

Clor serait-il la nouvelle machine à faire fantasmer les kids anglais ? Rien est moins sûr car la concurrence est rude d’un mois à l’autre et les missiles jetés dans les charts n’en finissent pas de pleuvoir créant finalement plus de remous que de véritables ondes de choc. A peine commence-t-on à adorer les nouvelles idoles prolos que sont les Arctic Monkeys ou Art Brut que l’on dirige nos consciences à coups de formules dithyrambiques vers la venue d’un nouveau messie. Mais la comparaison avec les premiers s’arrête là. Plus chic, plus arty, plus groove, Clor est né dans le quartier de Soho de la rencontre entre deux musiciens DJ, Barry et Luke, lors d’une des soirées branchées de la capitale. La rencontre fit tilt et, les nouveaux compagnons, convertis aux joies du home-studio, se mirent très vite à composer ensemble, sans véritable cap de départ, brassant large du ragga à l’électro. Après deux années de rodage autour de Londres, le duo, devenu un quinquet, fédère désormais un noyau de fans plutôt versés dans la culture club et semble prêt, sur la foi de ses 11 compositions à se jeter dans les fosses européennes. Gaffe quand même à la concurrence y compris dans son propre camp avec les Engineers, Tom Vek , The Infadels pour ne citer qu’eux !

Pourtant, on aurait tort de prendre ces nouveaux venus à la légère car ils possèdent des arguments plutôt convaincants : pop épileptique et exigeante, des mélodies en escaliers truffées de ruptures et d’accélérations, une batterie métronomique et des grooves de basses synthétiques à faire pâlir l’ami Jay Jay Johanson. Ajoutons à cette mixture explosive des riffs de guitares tranchants et une production métallique pour parfaire la panoplie de la pure machine à danser incontrôlable.

L’entame de l’album démarre à 100 à l’heure avec 4 titres tirés au cordeau qui réussissent à nous faire entendre quelque chose de différent depuis fort longtemps. « Good Stuff » avec son refrain aguicheur joue les prétendants au tube potentiel, serré de près par « Love and Pain ». En deuxième mi-temps, c’est la paire « Dangerzone » et « Making You All Mine » qui remporte la palme. Inventif et chien fou, Clor se créé aussi des espaces de respiration qui dévoilent un songwriting touchant quand il est libéré de tous ses artifices. « Gifted » et sa mélodie velvetienne par exemple ou « Goodbye », ritournelle plaintive à la manière de Pixies assagis, en guise de sortie finale.

Pour autant la copie de Clor est loin d’être parfaite. On y trouve des titres moins aboutis. On pense notamment à « Magic Touch » où le groupe confond beat et mélodie tandis que le chanteur, avec sa voix de fausset, se prend pour Prince. Il y a aussi un « Garden of Love » artificiel qui tourne à vide et un « Stuck in Tight Spot » schizophrène comme seul Prodigy sait l’être. Jusqu’à ce goût prononcé pour le mauvais goût justement : l’esthétique plastique de la production, les gadgets sonores (bris de verre, batterie électronique martiale) intempestifs et artificiels.

Saluons malgré tout le bel effort accompli par Clor pour se démarquer des autres productions du moment avec pour seul mot d’ordre, danser et danser encore jusqu’à se taper la tête contre les murs ! Une ambition finalement lucide et mesurée.

-Le site de Clor