Alliée à la tranche radicale du revival post-punk, cette formation US brandit un rock frontal et pesant dans la droite lignée de Joy Division et la clique The Fall, Wire ou PIL. L’équivalent dégraissé des jeunes espoirs britanniques du moment.


Certains artistes rock ne manquent pas d’ambitions, d’autres construisent leur carrière autour du même format ad vitam repetitas. Et l’ont recense autant de réussites dans chaque clan : les Ramones ont composé inlassablement le même morceau jusqu’à la fin tandis que David Bowie s’est évertué durant près de vingt ans à jouer les caméléons du rock sur chacun de ses albums.

L’ambition de Wilderness se situe dans la modeste première catégorie. Ce combo séminal, quatuor originaire de Baltimore, a établi son dogme rock autour d’un seul et unique morceau, le surpuissant “Day of The Lords” de Joy Division. Et s’y applique inlassablement. On ne peut pas vraiment leur en vouloir, l’héritage légué par l’épileptique Ian Curtis reste tellement mémorable que 25 ans plus tard son culte perdure chez quantité de formations. Les titres des Wilderness ne cachent d’ailleurs pas leur affiliation et nous laissent même un sourire en coin : “Emergency”, “Death Verses”, “Monumental”… Par contre, la pochette très flashy tranche avec les habitudes noires du genre par son mauvais goût affiché, rappelant le papier peint épouvantable des films 70’s de Dario Argento.

Pour gagner le titre de disciple de la division de la joie, la tâche peut s’avérer plus ardue qu’elle n’y parait… Notre consortium « sauvage » cogite depuis 10 ans dans l’ombre, sans compter que leur premier album éponyme fut en chantier durant près de trois ans. Heureusement, ce second opus, conduit par le producteur précédent Chad Clark (ingénieur prisé du label Dischord) semble avoir été mis en boite plus rapidement.

Rangés sans hésitation dans la catégorie post-punk atmosphérique, les Wilderness n’ont pourtant pas retenu – comme la plupart de leurs contemporains – l’urgence rock, mais plutôt cette notion de gouffre et de léthargie pesante. Il va sans dire que Vessel States a été conçu dans des conditions propices à ce conditionnement moral déprimant, entre la chute des feuille mortes et l’arrivée du vent glacial hivernal de l’année 2005. A bien des égards, leur approche viscérale des guitares grinçantes les relie aux productions les plus tentaculaires de Martin Hannett (le sorcier du son derrière Factory). Une batterie limite rampante conduit une marche que l’on qualifiera de doom post-punk (le réussi “Fever Pitch”), tellement le climat est pesant. La voix très cambrée de James Johnson évoque John Lydon période Pil et bien sûr Ian Curtis. L’effet procuré par ce chant clamé est impressionnant, même si on a tendance à imaginer le gaillard s’époumoner face à un pied de micro qui doit mesurer 2,50 m de hauteur.

Lorsque Wilderness parvient à ses ambitions, la puissance qui s’en dégage terrasse d’effroi l’auditeur (“The Blood Is On The Wall”, “Gravity Bent Light”). Mais leur formule s’avère malheureusement rapidement redondante. Il y a bien quelques digressions rock plus concises tel ce “Beautiful Alarms” à la mélodie désincarnée, et “Monumental” posté en dernière ligne, qui laisse traverser un rayon de lumière – bien mince on le concède. Les 40 minutes de Vessel States laissent entendre un résultat mitigé, bien que cette approche d’un rock sans concession ferait passer pour un boys band certains groupes anglais qui revendiquent la même appartenance.

– Le site de Wilderness

– On écoute « Emergency«