Quatre mains pour un dialogue inouï en noir et blanc, sur cent soixante-seize touches. Les duos de pianistes ne sont pas si fréquents pour que celui-ci arrête toute notre attention. D’autant plus que Bill Carrothers et Marc Copland figurent parmi les plus passionnants musiciens de jazz apparus ces dernières années. Le premier fut découvert il y a huit ans avec le magnifique After Hours, le second distribué et révélé en Europe sur le tard, à la même époque, grâce notamment au label Hatology. S’adonnant au vaste labeur d’une mise en danger perpétuelle, ils ont tous deux pour habitude de remettre le lendemain à aujourd’hui afin de plier le temps et l’espace à leurs desseins. Proximité harmonique de deux pianistes voués à se rencontrer sur disque (ils s’écoutent et s’entendent depuis près de vingt ans), complémentarité des timbres qui voit l’impressionnisme de Copland se marier avec les troublantes lignes d’accords elliptiques de Carrothers. Economie des notes et clarté d’un propos commun qui s’accommode de toutes les libertés. Et du silence. Ornette Coleman (“Lonely Woman”) y croise Miles Davis (“Blue Is Green”), Neil Young (“The Needle and the Damage Done”) échange avec Wayne Shorter (“Masqualero”), Duke Ellington (“Take The A Train”) converse avec Thelonious Monk (“Bemsha Swing”) : des standards comme autant de vertiges qui s’imposent d’eux-mêmes, sans réserves ni préméditation. No Choice. Ces deux pianos n’en font plus qu’un, ô combien sublime.
– Le site de Minium.
– Le site de Bill Carrothers.
– Le site de Marc Copland.