Dans la catégorie déchirante des albums « qu’on-aurait-tant-aimer-plus », Tearing Sky occupera désormais une place de choix. Pourtant, les premières écoutes ne laissaient rien présager de la lassitude qui nous gagna par la suite. A l’instar de Leave No Trace, le premier disque prometteur de Piers Faccini, ce second opus réunit une somme d’éléments particulièrement avenants qui aurait dû lui assurer une pérennité indiscutable : un jeu de guitare « pickée » tout en délicatesse, une voix ample et généreuse, des ambiances clair-obscur intimistes, un savant métissage entre la musique mandingue, le blues ancestral et le folk bucolique, un sens remarquable de la retenue et de l’épure… Autant de qualités indéniables qui ne suffisent pourtant pas à gommer deux écueils sur lesquels vient buter l’album : tout d’abord, une production aseptisée et maniaque (on reconnaît la patte lisse de JP Plunier, le responsable du son léché de Ben Harper), qui loin de donner du relief aux compositions de Faccini tend au contraire à figer les particularités musicales dans un écrin qui sonne faux à force d’être poli. Ensuite, la présence conjugée du bassiste Juan Nelson (Ben Harper) et du batteur Adam Topol (Jack Johnson) se révèle néfaste dès lors qu’elle s’organise en un dialogue circonspect des plus conventionnels. Notamment, l’utilisation par trop systématique d’une basse qui ne cesse de faire le dos rond et de balais qui n’en finissent pas de nous caresser les oreilles rend à la longue l’écoute pénible, et nous font regretter que le songwriter n’ait pas plus souvent fait chambre à part (comme sur les beaux “The Road’s Not Long” et “Walk Over To You”). C’est bien un sentiment de relatif gâchis qui prévaut au final, mais on continue d’espérer que Piers Faccini parvienne un jour à restituer en studio la magie vibrante de ses prestations scéniques, et ce même si le succès mérité et croissant qu’il rencontre nous incite aussi à penser que son génie risque fort, à l’avenir, de ne plus sortir de sa prison dorée.
– Le site de Piers Faccini.